Ah flûte, zut, pouacre, m****, bigre.

Chez Songazine on nous abreuve de CD et de liens, mais il nous arrive de rater des gros poissons, des trucs qui font du bruit, des artistes qu’il ne faudrait surtout pas laisser sur tribord. Notre filet est petit, mais il ne ratisse pas les 7 mers. Notre chalutier éditorial est sans doute plus proche de l’embarcation pleine de marins bretons smicards que du navire-usine chinois qui dévaste l’écosystème. Penn Ar Bed et Gwinn Ru, 4ever.

Le bestiau gluant, collant qui m’a glissé des mains c’est Squid (aka calamar en langue fish and hip).

Je vais être franc comme un encornet frit : j’ai lu TSUGI qui en dit vachement du bien, puis vu des chroniques étoilées en d’autres endroits de bon aloi, des indicateurs qui se sont allumés dans la nuit, on dirait un ciel oriental un soir de pluie de roquettes. J’ai pas tous les contacts, mais du pif, peut-être.

L’album Bright Green Field verdoie sur xxx sites, chacun y va de son dithyrambe de lancement. Alors, bon sous-marinier j’ai noté les échos, les signaux, les bruits sinusoïdes. Captain ? Torpedo, los !

Donc, à défaut de dossier de presse tout cuit… j’ai fait comme vous, j’ai mis mes bottes et pris mon épuisette Youtube. J’ai pas de ciré jaune, excusez-moi. Un seau, une pelle, Bandcamp et sur la plage abandonnée, j’ai chopé les palourdes, gratté les oursins. Ça pique mais c’est bon.

La trouvaille Squid frétille, mord, griffe, crache dans le bac s’apparente plus au regalec qu’au homard. Une bête pas connue, biscornue, le genre un truc qui vient des profondeurs avec des mandibules, des ventouses et qu’on rencontre profond, profond.

Squid pousse des cris dissonants et harmonieux, fait gicler une bisque de jazz, poivrée de rock et assaisonnée au danger. Un son ultra-salé, un murmure aigre-doux, une brise de mer anxieuse. C’est une hot marinade acidulée où Rock Lobster meets Talking Heads kicks Shame qui se souvient des crises d’épilepsie de James Chance. Tu le prends, barf, tu reçois un jet d’encre indélébile.

En thon majeur.

Quand vous l’aurez saisi entre les tympans,décortiquez l’animal en faisant gaffe aux entrailles punk, aux morceaux qui durent 8 minutes et au venin hypnotique qui imbibe les pinces (y’en a aussi, des pinces).

Souvent, les groupes qu’ont retrouve sur la grève après une marée de 130 se dessèchent fissa, on s’en souvient aussi longtemps qu’un épisode de poubelle-la-vie, c’est dire. Roi des océans un jour, arête ton bar le lendemain.

Mais parfois, y’a des créatures des abysses toutes nouvelles qui rentrent dans le catalogue des bébêtes qui font peur. Longtemps.

Le Squid 2021 lieues sous les mers pourrait figurer dans tous les bons aquariums, mais ne le montrez pas aux gamins, aux âmes sensibles, aux amoureux des gentils marsouins. C’est plutôt fais-lui-peur, le dauphin.

Si vous aimez la bouillabaisse qui arrache, si vous ne crachez pas sur du barracuda au piment fort, payez-vous une tranche de Squid.

OK voilà, je rentre au port Ker-Rock Critic, chui pas bredouille. On a not’ fierté les Songazinec !

Jérôme «one step behind » V.

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