Le duo parisien UTO a pris un véritable virage depuis son dernier album de 2022. Déjà baigné dans une dreampop teintée d’une touche de folie, le groupe pousse le curseur encore plus loin avec « When all you want to do is be the fire part of fire » sorti ce 12 avril, et met un pas bien plus franc dans un chaos multicolore intense, assumant une certaine folie extraterrestre. Le « feu » de cet l’album est loin d’être une orchidée en pot qui trône timidement dans le coin du salon : il illustre le brasier ensorcelant dans lequel vous vous apprêtez à plonger.

Cet album bien tripé c’est la sortie de l’hibernation, c’est la mue d’un reptile magique, qui abandonne sa peau ennuyeuse et terne de l’hiver pour de nouvelles écailles aux reflets colorés éblouissants. Dès que vous entendez le premier morceau de l’album « Art&Life », c’est comme chausser des lunettes de réalité augmentée aux verres irisés arc-en-ciel (et ouais rien que ça). Maintenant c’est bon, vous êtes bien équipés, ceinture attachée pour affronter comme il se doit les prochaines crises épileptiques ascensionnelles et les montagnes russes multidimensionnelles.

« 2 Moons » illustre bien la sensation ralentie et onirique, vous savez cette sensation de course au ralenti dans un rêve, comme si on courrait de toutes nos forces sous l’eau. Un clip lunaire et poétique, une électro atypique sublimée par des orchestrations de violons, par une guitare et des percussions folks. Avec « Unshape », il vous suffit de plisser un peu les yeux pour voir passer des soucoupes volantes dans le ciel. Morceau qui trouve son parfait équilibre entre un univers à la fois intimiste et explosif, parfaite définition du groupe.

« Zombie » nous entraîne dans un tourbillon électro jungle où le visualiser nous rappelle les clips dans le même esprit qu’ « Hunter » de Björk avec des visages tourmentés qui s’étirent de manière cauchemardesque. Une musique galvanisante où les voix robotiques et les synthés de la fin nous projettent dans un jeu vidéo vintage. On s’imaginerait presque dans la peau d’un robot humanoïde pixélisé en pleine évolution, qui mute comme un Pokémon vers sa version augmentée.

Le fou « Napkin » propose quant à lui un clip vidéo déjanté où le drop explose sur l’envol d’un mouchoir froissé dans lequel la chanteuse vient de se moucher. Un son entraînant qui nous plonge dans une atmosphère où nos sens sont altérés par une fièvre ardente, un sentiment d’urgence, des lumières rouges. Des couleurs et un clip qui ne sont pas sans rappeler ceux de Fatboy Slim avec « Right Here, Right Now » : il y a une énergie primitive, décalée, la caméra suit la marche d’un protagoniste sur une musique qui se déploie dans une intensité croissante.

En bref, UTO c’est un univers parallèle, mais vraiment parallèle. C’est une expérience sensitive, un imaginaire qui nous laisse bouche bée. Monde où règnent la déformation, les altérations, les basses percutantes, les variations expérimentales, le psychédélisme absurde. Une sorte de plat épicé où les extrêmes sont juste dosés, où les rythmes et les sonorités pimentées sont magistralement équilibrés. Des transitions bien pensées qui ne nous font pas perdre une seule fois le fil : comme le survolté « Napkin » ensuite calmé par le doux « Lyrics » qui vient enrober délicatement le feu qui nous avait embrasé.

Olivia Germaneau

 

 

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