Sous le signe de l’expérience. Le programme de cette seconde et ultime journée du Hop Pop Hop Festival 2019 s’annonçait chargé. Résumé ici de notre parcours dessiné au compas affectif et à la boussole auditive.

Notre périple commence à la Salle de l’Institut, habituée aux partitions classiques, avec le compositeur allemand Niklas Paschburg. Ses mélodies de piano entêtantes composent des boucles servant de fondations puissantes à une musique contemporaine où l’homme orchestre construit entre claviers, accordéon et percussions un édifice d’une émouvante fragilité, d’une beauté paraissant aussi éphémère que celle d’un château de sable. Les embruns baltiques soufflent dans ces morceaux à la poésie raffinée qui nous transporte à l’aplomb des fjords norvégiens. À nous en donner le vertige.

Niklas Paschburg HPH19 Fanny Veyrenotes_resultat

On se hâte pour rejoindre la Scène Nationale où nous attendent les masques et la plume. Qui sont ces mannequins animés évoquant les personnages d’Orange Mécanique ? Mystère. Nous ne saurons pas. Mais on reconnaît l’emprunte vocale du chanteur, Jonathan Bree. Le crooner aux accents bowieniens est servi par une indie pop faussement indolente, où la basse entraînante dialogue avec une batterie ciselée à la précision. Élégance et discret détachement traversent Jonathan Bree et ses complices. Le déroutement initial cède vite la place à l’intérêt. Le set déroule les compositions du dernier album Sleepwalking. Le public est fasciné, hypnotisé. Les visuels reprenant les personnages présents sur scène ajoutent une perspective grossissante. Jonathan Bree nous propose-t-il la vision d’un monde imaginaire où chacun souffrirait d’une étrange prosopagnosie ? Ou bien une fantaisie délicate comme les fleurs blanches effeuillées par le chanteur ? Qu’importe. On est sous le charme du crooner et de sa pop raffinée.

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Aussi sûr que 1+1=2, ROPOPOROSE+BRNS= Namdose. Pour ceux qui ignoreraient les deux premiers, le résultat est donc la fusion initialement pensée comme une performance éphémère du groupe belge BRNS et des vendômois de Ropoporose lors du festival des Nuits du Botanique (Bruxelles), transformée depuis en une nouvelle entité à libération prolongée. Pour le plus grand bonheur des festivaliers massés au Jardin de l’Évêché. Namdose est par définition pensé pour la scène. Dont acte. Les deux batteries se font face, mettant sur orbite un rock intense, euphorisant.

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Pendant ce temps à la Salle de l’Institut, c’est la Catastrophe, celle annoncée et pour une fois tant attendue.

« Nous sommes le 14 septembre. Dans 7 jours l’été sera fini. On va essayer de se fabriquer ce soir un souvenir fort dont on se souviendra quand on aura 110 ans. » Forcément on n’a pas l’habitude d’un tel préambule. Vous êtes déstabilisé, on vous avait prévenus !

C’est ainsi que le groupe Catastrophe annonce la couleur du big bang sonique qui attend les festivaliers. Le collectif touche-à-tout talentueux à ce jour dans un format hexagonal n’hésite pas à s’affranchir des barrières du genre artistique, entrelaçant musique performance théâtre danse pour nous emmener dans son univers décalé où l’absurde n’oublie jamais sa moitié poétique. S’ils nous laissent imaginer qu’on peut « vivre sans peur », au moins le temps de leur set scintillant, leur lyrisme (Nuggets) se transforme en groove ravageur (Maintenant ou jamais) et contagieux ou en swing improbable (Be bop record). A dessein, on ne vous dira pas tout ni plus de ce qui se produit (ou pas) lors d’un concert de Catastrophe. C’est qu’on ressort de ce moment ébouriffé, transi et conscient qu’on vient de vivre une expérience unique. Pour les plus curieux, une interview est à paraître sur ces pages dans les jours à venir…

Catastrophe HPH 19 Fanny Veyrenotes_resultat

L’expérience continue à la Scène Nationale. Là, un mystérieux brouillard se dissipe paresseusement et découvre une installation florale déroutante, où une matrice de roses recouvre les machines. Celles d’Irène Dresel accompagnée de Sizo Del Givry aux percussions.

Maintenant oubliez ce que vous savez de la musique électronique et de la techno en particulier. L’univers d’Irène Dresel tintille et vibre avec pureté. Des ondes bourgeonnantes et synthétiques viennent se refléter dans un bain de lumière. Attention, au-delà du sensuel, une part animale, une énergie sauvage et terriblement romantique complète le travail rigoureusement conçu par Irène Dresel. Maintenant oubliez la fatigue. Laissez-vous envelopper dans les nappes langoureuses. Là, les bpm viendront vous accrocher et vous emmener jusqu’aux cîmes. Irène Dresel est cette magicienne qui récite une prière à Sainte Rita, « sainte des causes perdues », sur un de ses titres et qui de son énergie lumineuse parvient à agiter les atomes du plaisir au coeur de chacune de nos cellules. Vous avez bougé et vous avez eu chaud, pour votre plus grand bonheur ? C’était Irène Dresel en live.

Généreuse et authentique nous avons eu la chance de l’interviewer avec son complice Sizo Del Givry. A suivre dans Songazine…

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Bienheureux il nous faut quelques paliers pour retrouver nos esprits. Le choc est électrique, tension à 220 avec The Mystery Lights. A cette intensité forcément l’énergie est fulgurante, l’ambiance crade et déglinguée, le rock, furieux.

Beats per minute. Si c’est Kraftwerk qui résonne sur les platines des DJ du Jardin de l’Évêché quand on arrive, à 23:45 pétantes Arnaud Rebotini investit la scène pour le dernier concert du lieu. Sa silhouette impressionnante se détache derrière ses machines analogiques qui l’entourent à 360 degrés. Les rythmes rapides sont immédiatement efficaces. Sa marque de fabrique autant reconnaissable que ses cheveux gominés et ses baccantes. Hyper concentré, affairé, Arnaud Rebotini prend le micro et pose sa voix ombrageuse sur ses sons purs, tranchants. « I’m gonna get you move / Something special / Baby can you hear me now? » La tension monte d’un cran et ne redescendra qu’à l’extinction du set, fin de festival oblige.

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On laisse les derniers festivaliers profiter de la silent party. Quant à nous, même équipés d’échasses bioniques pour sauter d’une scène à l’autre, il nous aura été impossible de tout découvrir, richesse de l’offre oblige. Sur les chemins du Hop Pop Hop Festival 2019 nous avons été déroutés et follement ravis. Cinq ans déjà l’année prochaine, on se prend à rêver d’avoir un jour de plus…

Veyrenotes & Wunderbear

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