The Stranglers forment un groupe fascinant à plus d’un titre.

Pour commencer, ils émergent de la scène punk avec force et en étant assez énervés, provocateurs et rogues mais en jouant des chansons fort complexes.

Leurs paroles sont teintées d’ironie, comme de poésie et d’absurde. Ne comptez pas sur eux pour lever le poing contre la société à la façon de mes amis les Clash. Je pense qu’ils s’en cognaient allègrement. Mais ils distillaient venins et piques sans hésiter contre les idiots de tout poil.

Musicalement, ceux qui ont joué dans des groupes amateurs et se sont échinés à faire des reprises le savent bien : Sex Pistols = fastoche, Stranglers = quasi impossible. Le synthétiseur de Greenfield est fou, façon Doors, il monte et descend à une vitesse folle, d’ailleurs chacune de ses mains tape souvent sur un clavier différent en même temps. Cornwell ne joue pas des accords simples à la guitare, JJ Burnel est un as de la basse et Jet Black ne fait pas dans le rythme 4/4.

Dans leurs débuts, souvent leurs concerts étaient aigres-doux vs. le public qui crachait et souvent leur attitude en retour était aussi négative (Cornwell a souvent tourné le dos au public). La provocation et le cynisme comme arme, pour tester et agacer. Pas de facilité aguicheuse pour ceux qui eurent un moment un rat, puis un corbeau comme symbole. Humour noir, idées pas évidentes, en tout cas originalité forte et absence de compromis.

De plus, le son particulier et élégant de leurs albums studios n’était pas forcément bien reproduit en live, rendant parfois perplexes les fans dont je faisais partie. Cela n’entamait en rien l’admiration et la fidélité…

Autre paradoxe : leur histoire. Hugh Cornwell est parti en 1990 et a fait une assez belle carrière solo. On aurait pu croire que c’en était terminé du groupe, mais bonne surprise, ils ne meurent pas et perdurent avec classe. Voir interview de JJ Burnel ici.

Ce n’est qu’avec leur chanteur guitariste actuel Baz que -à mon avis- ils ont retrouvé du mordant. D’ailleurs les albums récents méritent d’être écoutés, même si leur heure de gloire est bien celle des 10 premiers albums, variés et puissants. Désormais, ils tournent et tournent de concerts en festivals et ne provoquent plus mais font du bien à beaucoup de monde.

Les Who chantaient « I wish I could die before I get old » et ils sont encore là. Les Stranglers braillaient « No more Heroes » et ils sont les nôtres jusqu’à plus soif !

Pour finir, merci à mon ami Lino avec qui on a écouté Rattus Norvegicus ou la Féline un paquet de fois, et je vous laisse regarder/apprécier ci-après leur prestation à Top of the Pops (TOTP) en 1977, avec leur chanson « tube ».

Formidable car ils n’en ont rien à faire. Ils se rient du playback et à mon avis, ont quelques grammes de substances licites ou non dans le sang.

Encore un truc bizarre, non ?  TOTP, grande écoute et audimat énorme, la TV autorisée qui montre une attitude punkissime. Imaginez cela en 2016 à l’heure du « léger différé » et des annonceurs-actionnaires.

Regardez jusqu’à la fin, la tête de Jet Black en gros plan vaut son pesant de corbeaux morts et de rats écrasés.

The Stranglers : paradoxaux, doués, pérennes et aimables entre tous. Emmerder le monde mais avec Art.

Jérôme «black and white » V.

https://www.youtube.com/watch?v=-gfIgA-PYyQ

 

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