L’été 2001, je l’ai vécu en Toscane comme une quinzaine d’autres et nous y allions en voiture de Paris… donc passions par la ville de Gênes, bien entendu. Moment difficile pour les voyageurs qui vont vers le Sud. Autoroutes suspendues entre flanc de montagne et mer en contrebas, virages serrés, ponts impressionnants, tunnels innombrables, contourner la capitale de la Ligurie n’est pas très agréable. On voit bien que cette ville est enclavée et semble d’un accès peu commode, en mode nasse. La géographie physique est en ces lieux implacable.

L’été 2001 fut abominable à Gênes, en tout cas du 19 au 22 juillet puisque s’y déroula le sommet du G8 et sa tornade de violences infernales. 400.000 personnes s’y étaient donné rendez-vous pour un contre-sommet, justement.

Frédéric Paulin nous replonge dans cet épisode peu glorieux pour l’espèce humaine, au travers des regards croisés de différents protagonistes se débattant in situ, dans une chaleur étouffante, avant et pendant les incidents (puisque ce G8 en a provoqué une cascade dévastatrice).

Nous suivrons, entre autres, Wag et Nathalie, activistes français pas si naïfs et pas si purs… mais aussi des policiers hexagonaux en infiltration, des journalistes qui en prennent pour leur grade, des forces de l’ordre italiennes plutôt réactionnaires dans un gouvernement qui avait M Berlusconi à sa tête, et des acteurs empêtrés entre politique et intérêts personnels.

C’est direct, sans concession, dur. Pas d’illusion chez Paulin, la « realpolitik » donne des coups directement dans l’estomac. Idéaliste, passe ton chemin…

On apprend de façon précise, mais avec stupeur, l’ampleur des violences des « black blocs » et le dépassement des limites des matraqueurs italiens, frappant trop fort et allant jusqu’à torturer des manifestants (!).

Entre le document précis et la fiction « la Nuit tombée sur nos âmes » se lit en une fois, en apnée et laisse un goût de sang dans la bouche.

L’été 2001, j’avoue que je regardais d’un œil distrait les images des actualités le soir en me disant « encore un sommet inutile, le grand cirque des chefs d’état orgueilleux et de protestataires apatrides qui s’amusent à casser des vitrines, pensons à autre chose», et quand nous sommes repassés par Gênes au mois d’août, pour nous il ne s’était rien passé.

Erreur d’appréciation que permet ce livre puissant de réparer.

Recommandé pour se forger une opinion étayée…

Et en septembre 2001, on passa à un niveau supérieur, côté brutalité des nouvelles. Nos âmes allaient encore prendre une belle griffure.

Mais ceci est une autre histoire…

 Jérôme « ti amo Italia » V.

Parution le 9 septembre , Agullo Editions

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