17 heures, vendredi 14 juin, arrivée sur le site du Biches Festival au milieu des bois et du bocage normand pour la quatrième édition du festival. Nous découvrons un site à taille humaine, les deux scènes qui se font face ne sont séparées que de quelques centaines de mètres, et c’est pourtant bien là que vont alterner des dizaines d’artistes sur les trois jours à venir. Ballots de paille décorés, palissades en bois, on capte rapidement une ambiance clairement bucolique et joyeusement détendue, l’accueil des bénévoles réchauffant un air un poil (de biche) frais pour le mois de juin. Songazine vous propose un panorama de cette première journée avec un zoom tout particulier sur notre coup de cœur du jour, le groupe Oktober Lieber qu’on a pu rencontrer en interview. Hop là !
C’est Tito candela qui a la délicate mission d’ouvrir les festivités et à en juger par le poncho bariolé qu’il arbore sur scène, on vient de glisser directement vers l’Amérique du sud, terre de lamas plus que de biches… Peu importe, les percus et l’electronica ensoleillée aux rythmes tendrement emmenant terminent de chasser les nuages au loin et font du bien à nos oreilles. Voilà qui augure de beaux moments à venir pour ce Biches Festival 2019.
Adrien Legrand nous ramène sur le vieux continent, quoi que derrière ses claviers et avec ses trois compères, on trouverait presque des accents raffinés british à sa pop suave. Le soleil couchant colore les textes doux amers romantiques ponctués de reverbs qui chaloupent.
Bumby est un ovni, qu’on pourrait prendre pour un capitaine Colombo venu de l’espace si on s’arrêtait à sa tenue improbable. Mais après un premier morceau instrumental atmosphérique, il salue les « Bichons (qu’il) invite à l’appeler Bumbish » avant de déployer un set composé de pépites poétiques électro psychédéliques aux boucles sautillantes des plus touchantes.
Il faut revenir les pieds sur terre, et c’est Aloïse Sauvage, libre et fière qui se charge de nous emmener, là où elle veut, tant son flow hip hop chanté étiré parlé incarné déroule de fougue apprivoisée.
Prenez 3 guitares 1 basse 1 batterie et 1 rasade d’excentricité qui emprunte autant au grunge qu’au Lo-Fi, avec énergie brute et distorsions s’ouvrant sur des fenêtres oniriques, vous obtenez TH DA Freak, enjoy !
Au Biches Festival, vous l’aurez compris, la nature est reine. Quoi de plus naturel donc que d’y croiser Voyou, dont la scénographie tropicale ne dépareille pas en pareil endroit ? C’est un groove tendre et festif que dégage Voyou et ses trois acolytes ravissant les festivaliers à une heure déjà avancée de la nuit.
Arrive Oktober Lieber, le duo prêt à envouter nos oreilles pour ne plus nous lâcher. Elles triturent les sons, syncopent, distordent et dynamitent la scène couverte en club géant. Il est 2h, le Biches s’éveille et il n’a pas sommeil…
Interview d’Oktober Lieber :
Il y a deux ans et demi, Marion Camy-Palou et Charlotte Boisselier ont eu la bonne idée de s’associer pour créer ensemble un projet musical, Oktober Lieber. In Human sortait en novembre 2018 chez Le Turc Mécanique, un album hypnotique et puissant. Songazine : Pouvez vous nous parler de votre rencontre et de ce qui vous a donné envie de faire de la musique ensemble ? Charlotte : on a fait de la musique ensemble d’abord dans un autre projet de Marion que je suis venue intégrer en tant que musicienne et après on a collaboré ensemble sur plein de projets différents, à la fois théâtraux, des performances aussi, des lectures, des choses qui racontaient des histoires aussi, pas que de la musique. Marion : on travaillait l’une sur l’écriture, l’autre sur la technique, sur le son. Il y a ce projet où on était à la base sur ce groupe qui a splitté, qui a créé trois autres projets. Songazine : Vous avez un son plutôt tendu, qui va à l’essentiel, avec une noirceur (qu’on retrouve aussi dans la pochette de In Human) froide et entêtante. Le parfait équilibre entre « accessibilité pop et structure club » en somme. On imagine des influences multiples. Comment composez-vous ? Marion : ça prend un peu de temps parce que nous partons d’une idée de base où l’on se dit on va créer une atmosphère un peu angoissante de film, un morceau un peu club, un track un peu pop. L’idée est là puis la mélodie et ensuite on travaille les structures. Charlotte vient de l’électro et a beaucoup poussé sur le coté structures, break, etc. On a cherché l’équilibre entre comment faire sortir un refrain sans tomber dans la pop, trouver une forme un peu originale pour être dans une forme club tout en gardant l’oxygène de la pop. Charlotte : on aime les mêmes matières, quand on cherche sur un synthé un son, on aime qu’il soit un peu poussé, le triturer avec des plugins, avec des effets, le rendre un peu étrange. On aime les sons un peu étranges, un peu moins attendus et c’est ça qui donne aussi cette atmosphère tendue. On recherche aussi beaucoup la texture, pas uniquement la composition.
Songazine : Nous n’avons pas pu nous empêcher de voir une résonance avec Kraftwerk en écoutant votre album, en particulier sur Computer Model… Marion : oui, surtout dans le titre. C’était pas le titre originel et à la fin c’était presque un clin d’oeil quand même. C’est un des plus minimaliste de l’album. Il y a aussi le traitement de la voix aussi qui est assez robotique. Songazine : Qu’est-ce qui est le plus important pour vous dans un morceau ? Marion : c’est que ça fonctionne dans l’imaginaire je pense. Charlotte : « c’est beau ça » (rires) ! Songazine : Qu’est-ce qui est le plus important pour vous quand vous jouez en live ? Charlotte : l’immersion, le contact avec le public. On essaye de jouer au maximum et c’est jamais exactement pareil. Le public si on le sent proche et bien absorbé alors ça nous met nous aussi dedans. On aime bien faire danser, en syncopant la rythmique, la diversifier. Songazine : Accepteriez-vous de partager avec nous un souvenir de festival particulier en tant qu’artiste ? Marion : dans les festivals récents, il y a eu Bad Bonn Kilbi en Suisse et Copenhague (Distortion Festival), dans la bibliothèque royale, décor un peu Harry Potter, avec des balcons, la bibliothèque en dessous, on a joué à l’étage, les gens étaient assis dans des bureaux anciens, une sorte d’auditorium… Charlotte : Oui et Bad Bonn Kilbi, c’est la plus grande scène jusqu’à présent avec un public que l’on ne connaissait pas. On a senti qu’on les a « attrapés » et le retour qu’on avait était très fort. Songazine : Et maintenant votre meilleur souvenir de festival en tant que festivalier ? Charlotte : moi ça va être les Routes du Rock, c’est une sorte de rendez vous de l’été. Je me souviens de Peaches qui dès le premier morceau s’est jetée sur les gens! Et Villette Sonique à Paris à l’époque où c’était Etienne Blanchot qui programmait c’était vraiment un des mes préférés. Marion : je n’ai pas fait beaucoup de festivals mais j’ai un souvenir quand j’avais 17 ans, au Pays Basque il y avait des groupes de métal et de rock basque, c’étaient les premiers festivals, genre grosse teuf entre potes, on se faisait réveiller par les mecs qui avaient des cloches de berger et qui passaient entre les tentes. Et j’étais devant pour un groupe de métal et je suis tombée dans les pommes et j’ai été rapatriée 1000 personnes plus haut, portée par les gens. Non, mais c’est un souvenir joyeux ! Propos recueillis par Veyrenotes & Wunderbear |
Live report Veyrenotes et Wunderbear, photos Veyrenotes