Invité à écrire la bande originale de la première édition d’un festival d’art multiculturel sur le thème du silence, Aret Madilian, fondateur du groupe franco-américain Deleyaman, a pu présenter le fruit de ce travail dans 14 abbayes Normandes en 2022, sous forme d’exposition sonore.
D’ores et déjà disponible en format vinyle et CD, The Abbey Project permet d’écouter chez soi dans l’intimité, plus au chaud (quoique, en ces temps de pénurie d’électricité…), éclairé (voire chauffé, donc) à la bougie, 10 pièces musicales pour un total de 45 minutes.
 
 
Aret utilise surtout divers instruments à vent, aussi bien boisés que cuivrés, mais aussi cordes et piano. Et chaque titre porte un nom d’étoile pour un ensemble tour à tour rayonnant et crépusculaire.
L’œuvre est en effet d’une grande variété sonore et mélodique. Mais tous les morceaux ont en commun un penchant hautement spirituel, apaisé autant qu’apaisant.
Mystères et ambiance mystique vont de pair, un soupçon de mélancolie pointe son nez, mais jamais n’est-on entraîné vers le trou noir du désespoir. Bien au contraire, cette œuvre stellaire réconforte, vous plonge dans la méditation, la rêverie, voire l’élévation.
 
The Abbey Project commence par un magnifique « Sirius » empli de musique sourde des paysages lointains où énergie et mélancolie, soleil et nuit, se confondent. « Véga » apporte une respiration légèrement chaloupée en milieu de disque, pouvant évoquer un le Sting période Nothing like the Sun avec un saxophone un poil trop marqué Branford Marsalis. Pas désagréable, mais on préfèrera les plaintes du duduk ou du oud qui parsèment ce projet hautement artistique.
Le piano délicatement joué par Madilian sur « Rigel » rappelle par moment le Morricone des années 80 (Cinema Paradiso) et le premier souffle exotique de « Procyon » évoque tellement Dead Can Dance que l’on s’attend à entendre les vocalises de Lisa Gerrard. Bref, si l’on en était pas encore convaincu, il est en tout cas absolument évident qu’Aret Madilian est un excellent compositeur et que le cinéma devrait faire appel à lui au plus vite.
The Abbey Project sonne en effet comme la plus belle des bandes originales de film.
A l’auditeur de créer les images!
 
Yannick Blay
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