Cet article est le numéro 5 sur 7 du dossier Hellfest 2016

C’est bien beau de s’intéresser aux têtes d’affiche, aux grands noms, aux légendes du riff et aux sexagénaires de la distorsion. Mais parfois, c’est trop facile. C’est vrai quoi, à chaque fois qu’un média généraliste évoque le Hellfest, c’est toujours pour citer Korn, Rammstein, Black Sabbath, et puis c’est marre. Allez, éventuellement Judas Priest si le journaliste a écouté autre chose que Vincent Delerm dans sa vie. Mais ne serait-il pas cocasse et jubilatoire de pouvoir lire, ne serait-ce qu’une fois, les mots «Agoraphobic Nosebleed » ou « Cattle Decapitation » dans les colonnes du Monde ?

 

C’est vrai, ça, merde ! On n’a d’yeux que pour les mastodontes du genre. Mais qui est là pour s’intéresser aux groupes plus modestes et moins médiatisés, aux talents de l’ombre, aux seconds couteaux pourtant sacrément affûtés, à tous ces galériens du headbang qui suent en coulisses depuis vingt ans ou plus, à enchaîner les tournées sans fin dans des salles confidentielles qui hument bon le houblon et la sueur, distribuant des mandales avec la rage et la conviction d’un Robert de Niro dans Raging Bull ? Eh bien Songazine est là pour ça. Aujourd’hui, mesdames et messieurs : Victims, un groupe que vous risquez de voir mentionné assez rarement dans Madame Figaro.

 

Actif depuis 1997, Victims est très loin de légitimer son patronyme. Les victimes, ça serait plutôt nous, pauvres auditeurs, et eux les bourreaux. Victimes d’une explosion sonore sans précédent, crucifié au sol par le mur de distorsion et de violence bilieuse que dégueule cette formation suédoise de crust punk. Oh le vilain mot ! Mais kézkeçéça le creuste peunkeuh ? Eh bien, cher lecteur, plutôt que de me lancer dans un laborieux cours pour t’expliquer l’histoire du style, ses principaux représentants et tout le tintouin, j’ai décidé de te préparer une recette de cuisine. En avant pour une bonne plâtrée de crust grâtiné.

De l’autre côté de la Manche, « crust », ça veut dire croûte. Donc, on va avoir besoin d’une bonne chapelure de guitares, pour obtenir un son le plus épais possible, façon metal justement. On est assez loin de la production rachitique des vieux albums du punk seventies. Démonstration :

Maintenant qu’on a un son épais et qui croustille sous la dent, on va devoir passer à l’assaisonnement. Vous vous en serez rendus compte, le crust, ça se savoure bien relevé. Privilégiez donc des vocaux les plus pimentés possibles, pas question de se contenter d’un vulgaire poivron moisi, on veut du tabasco deluxe, du napalm en flacon, du qui décolle tes posters de ton mur :

On n’oubliera pas de rajouter une grosse louche de D-beat, ce pattern de batterie si reconnaissable et popularisé entre autres par Discharge :

Et pour que le tout soit encore plus goûtu, on termine en nappant le tout d’une bonne dose d’un groove très Motörheadien dans l’esprit :

C’est prêt, bon appétit. Et n’oubliez pas de ramasser vos dents par terre après avoir fini votre assiette.

 

Matthieu Vaillant

 

Dans le dossier :<< Keupons comme cochinsHellfest : une comm’ d’enfer >>
Share