L’une de mes premières émotions musicales, marquante, je la dois à Tangerine Dream.
Un excellent ami, Pierre M., m’avait enregistré sur K7 audio BASF C-90 « Ricochet 1 & 2 ». J’écoutais ces planantes séquences au casque dans mon lit, dans le noir et je partais bien loin. Expérience sans danger apparent, mais enrichie en effets secondaires sur mon cerveau adolescent déjà surchauffé par les lignes d’Asimov, K. Dick et Bradbury.
Ma richesse se limitait à une vingtaine de K7 audio, enregistrées patiemment par des copains disposant, eux, d’une véritable « chaîne hi-fi » (waow), mon précieux « ghetto blaster ». Le tout constituant une source vive de joies fortes. Je découvrais sans cesse des univers, des nouveautés, des groupes ou des styles… et l’information était rare ! Issue de magazines mensuels que je lisais de la couverture à la dernière page avec appétit. Un seul article de Michka Assayas pouvait déclencher des débats profonds avec mes amis ; nous imaginions le rock critic comme un être siégeant sur un trône de cristal, dans une rédaction enfumée, détenteur de contacts avec les divinités qui créaient les 33 tours ex nihilo. (et pour se cultiver encore, à peine étancher sa soif : les voyages d’été en Angleterre, planète féconde et mine de joyaux, perles et reliques)
Aucune nostalgie en ces lignes car ma quête n’aura pas de fin, mais le souvenir d’un engagement total et initial dans l’écoute de sons merveilleux.
Tangerine Dream nous propose en 2018 la B.O. d’un film catastrophe que je n’irai pas voir (Miracle Mile), mais c’est avec un léger frisson que je clique sur play pour lire les fichiers mp3 envoyés par Alice de Fire Records. Aujourd’hui je possède des centaines de milliers d’heures de musiques, j’ai acquis le privilège d’être de ceux qui informent sur la musique mais je mets mon casque et je me concentre. Le charme ne s’est pas rompu, la magie opère encore : Tangerine Dream m’expédie 40 minutes en apesanteur à coups de synthétiseurs. Inutile d’entrer dans les détails, le cocktail titre fort et mes neurones apprivoisés se mettent à onduler. Le talent, le savoir-faire ne sont pas corrodés, oxydés, atténués et les 11 morceaux s’enchaînent comme autant de planètes, croisées en vitesse-lumière. Sourire, cœur content, écoute répétée.
Comment conclure, si ce n’est en exprimant de la gratitude à mon ami, aux K7 audio, à Tangerine Dream, à Fire Records, aux planètes inconnues que l’on croise en vitesse-lumière et à l’inventeur du casque audio.
Jérôme « miracle tape » V.