La musique de Paul Roland a quelque chose d’intemporel. Naviguant entre le (néo)folk baroque, le rock garage-psychédélique et le rock gothique, nous voyageons vers des paysages lointains, des royaumes oubliés et des temps anciens. Nous découvrons les histoires de personnages sombres, colorés, fascinants et intrigants comme le Docteur Cream, Walter l’occultiste et Miss Emilia Saint-John, les aventures et péripéties d’explorateurs du ciel (“Wyndham Hill”) et de bandits de grand chemin (“Captain Blood”).
Si ce dernier album, au doux nom de Morbid Beauty, ne déroge pas à la règle, on note une différence notable avec les précédents travaux de Mister Roland, en termes de production. Le chanteur excentrique a lui-même expliqué qu’il voulait “quelque chose de différent”, de plus “brut”. Si l’on retrouve les ambiances psychédéliques, orientales même, folkloriques – typiques de notre dandy anglais – les arrangements s’articulent essentiellement autour d’une formation simple : guitare, basse, orgue et batterie. Un violon et un piano ajoutant parfois une touche folk à l’album.
S’ouvrant sur des sonorités orientales et mystiques, “The Stars in their Millions” est une longue montée d’acid rock, puissante et tendue, où orgues psychédéliques, voix lointaines, violon obsédant, guitares fuzz et batterie tribale se joignent progressivement à la cérémonie. On est comme envoûté, happé dans cette longue danse sombre et rituelle. Une vraie réussite. Assurément l’un des moments forts de l’album, et l’un des meilleurs titres de Paul Roland.
Si “The Stars in their Millions” semble nous transporter dans un ailleurs lointain, les titres “Candy Man », “Mephisto’s Blues” et “Graveyard Train” (il existe une version live acoustique de 1986, sur la réédition de A Cabinet of Curiosities / Happy Families parue chez Syborgmusic en 2009) nous ramènent à une réalité teintée de garage-rock et d’horror psychédélique. Toutes guitares noisy dehors (le final frénétique de “Candy Man” !!), ces trois titres, dans une veine plus “classique”, évoquent certaines atmosphères chères au dandy anglais sur Duel, Roaring Boys et des albums récents comme 1313 Mockingbirds Lane et Lair of the White Worm.atmosphères chères au dandy anglais sur Duel, Roaring Boys et des albums récents comme 1313 Mockingbirds Lane et Lair of the White Worm.
“The Light Divine” est une ré-écriture de “Journey to the Centre of the Mind”, parue sur la compilation Roaring Boys & Sarabande en 2012. Comme “The Stars in their Millions”, c’est un long morceau dense et magnétique, tout en crescendo, avec un violon atmosphérique qui guide le morceau vers un final batterie-violon-flûte hypnotique.
Mais les ambiances se succèdent mais ne se ressemblent pas, comme sur le magnifique “Wilful Angel”, aux arrangements folk subtils et mélancoliques, où là encore la batterie aux accents tribaux ajoute quelque chose d’hypnotisant au morceau.
L’album se termine par “Godzilla”, qui rappelle par moments l’excellent “Nosferatu » (sur Duel, sorti en 1990). Un titre caractérisé par une basse lourde et inquiétante et une batterie explosive, terminant sur une fin calme mais tendue… A l’image de tout l’album qui mêle avec brio les ambiances claires et sombres, psychédéliques et gothiques.
Avec Morbid Beauty , Paul Roland nous offre un album de haute volée, certainement l’un de ses meilleurs, révélant une fois de plus son talent pour écrire des chansons aux atmosphères riches et intemporelles. Un must pour tous les amateurs de rock psychédélique et tous les fans du dandy anglais.
Bandcamp – Blue Matter Records