Si vous arpentez Granville en Normandie, passez donc dans la rue des Juifs, une rue à la verticale qui abrite galeries de peintures, brocantes et l’incontournable librairie Le détour avec sa barque sur le trottoir, bien pratique et pittoresque pour les dédicaces quand le soleil est au zénith. Et puis plus haut, vous tomberez sur la Galerie de l’Os. C’est l’artiste peintre-plasticien Blaise Lacolley qui l’a ouverte en 2013. Il s’est lancé dans la création de momies à échelle réduite à partir de matériaux de récupération, de latex et aussi de jouets d’enfants.
Il invite aussi d’autres artistes dont régulièrement un certain Jacques Lacolley, son père, que j’ai rencontré « Je n’ai pas fréquenté d’école d’art mais j’étais très tôt confronté dans ce monde soit par la famille ou les amis. Voir les œuvres, entendre les conversations, aller dans des musées, ça donnait vraiment envie de pénétrer cet univers avec de plus en plus de passion. Et puis un jour on se dit : allons-y ! L’atelier, c’est mon appartement, je vaque, je rentre, je sors, je cuisine… mes fils marchaient à quatre pattes dans l’atelier; j’ai commencé par la peinture abstraite puis par le figuratif le plus pur avec une critique de la modernité en soupçonnant certaines œuvres d’être des signes vides dans l’abstraction. J’aime les grands figuratifs que sont Françis Bacon et Lucian Freud mais aussi la peinture classique, Goya et Rembrandt.
La femme est souvent le principal objet de sa réflexion picturale. Amoureuse, domptée, combattante, Vénus sublime et désemparée. La chair exulte, jamais mièvre mais abondante et furieuse.
« Je recherche souvent un premier plan puis le sujet est derrière. J’organise le regard, j’aime bien l’idée de position de voyeur. Parfois, j’intègre une figure géométrique comme un élément de censure comme pour la série Te quiero ou Maria vestida vue -inspiré par le tableau de Goya – La maja desnuda-. J’ai une idée, un thème et je fais toujours une série ».
Pour sa dernière exposition, 8 grands tableaux pour La baigneuse, l’anodin et le tragique, « j’étais parti pour beaucoup plus, à un moment je me dis, le dernier, c’est celui-là»
Tout un travail préparatoire important par des croquis: sanitaire, carrelage, choix de la plomberie…
Trouver enfin la ligne de fuite qui donne dans l’espace la perspective puis attaquer directement sur la toile. Visage parfois doux, machineries inquiétantes «Ce qui m’intéresse, c’est donner à une situation anodine son aspect très tragique et fort».
La musique contribue largement à son inspiration, à cette idée de la circulation d’une œuvre à une autre « Je travaille toujours en musique ; j’écoute beaucoup de musique Classique. Francis Poulenc pour me laver les oreilles et me mettre à créer. Quand il y a une chute d’énergie, j’écoute Bach, les Variations Goldberg. L’œuvre pour clavier surtout, ça me shoot complètement. »
Extrêmement sensible aussi à la littérature, grand lecteur de Rabelais (qu’il relit toujours en boucle), Céline, Blaise Cendrars, Apollinaire… «Pour préparer une exposition, je produis toujours un texte le plus juste possible pour présenter mon œuvre.»
Radical dans sa manière d’appréhender la peinture, il a détruit beaucoup de choses (en 50 ans de création) avançant toujours sans concession, en étant indifférent à la vente (il avait un métier, donc n’était pas soumis à des considérations économiques). Il ne vous présente donc uniquement que ce dont il revendique, une œuvre verticale, qui fait face au spectateur.
A découvrir absolument dans la galerie la Galerie de l’Os et sur son site internet : jacqueslacolley.fr
SZAMANKA
Galerie de l’Os
46 ter, rue des Juifs
50400 Granville
06 62 59 93 90
06 77 03 56 55
page facebook : galerie de l’os