Je marchais dans une rue du Pré Saint-Gervais avec vivacité et ceux qui me connaissent savent que c’est vrai, je marche vite et je ne reconnais pas grand monde quand je vais de A à B.
Cependant, mon regard fut attiré par la couverture d’un livre posé sur le trottoir. M’arrêtant une demi-seconde, je vis qu’il était en anglais, format poche et aux pages un peu jaunies. Je le saisis. Fichtre, me dis-je, un livre en anglais en cette terre hors des limites du périphérique parisien ? Et je l’emportai, son poids léger n’entamant en rien ma vitesse de déplacement.
Il s’agit de Mulliner Nights, recueil de nouvelles de P.G. Wodehouse, constituant le troisième volet des récits de Mr. Mulliner, bien au chaud avec ses amis dans un pub appelé the Angler’s Rest (au repos du pêcheur à la ligne).
Ce gentleman narre des histoires à une assemblée sûrement masculine et désignée par ce qu’elle boit ( a Whisky Sour, a Beer Tankard, a Sherry and Bitters etc.), lui-même dégustant un Hot Scotch ad Lemon (voir recette ici).
Les héros en sont des membres plus ou moins éloignés de sa famille (des … Mulliner donc). La langue est très riche, imagée, il y a des allusions 100% British, et les phrases sont longues, l’anglais est daté (1933) et c’est tout cela qui donne un charme absolutely fabulous à ces textes.
Les histoires racontées sont gorgées d’un humour à la fois loufoque, ironique, lucide, qui part parfois dans des directions absurdes.
Tour de maître : on est captivé et complice de Mulliner, on l’écoute nous aussi bouche ouverte, laissant notre pinte de lager tiédir, n’osant pas lancer une fléchette.
L’esprit est drôle, les héros sont des jeunes gens intrépides et naïfs, des jeunes filles belles et piquantes ou même le chat -d’un évêque- appelé Webster, des colonels à moustache et on se retrouve pour le weekend dans des châteaux pleins de chambres et de haches.
P.G. Wodehouse est un génie du comique, un grand maître de la matière à mes yeux la plus noble de la littérature, l’humour.
Pour une trouvaille faite sur le macadam, ce fut splendide.
Jérôme « I’ll have a Fernet Branca » V.
PS : en revanche, si vous cherchez des livres formidables et souhaitez ne pas vous en remettre au seul hasard, lisez plutôt tout ce que vous pouvez et qui est décrit sur le webzine littéraire Un Dernier Livre Avant La Fin Du Monde, où exerce notre brillante amie Hédia (dont les critiques travaillées et précises sont des bijoux, des modèles en comparaison desquelles vingt Penelope les unes sur les autres plus la mallette de billets comme rehausseur n’arriveraient pas à la cheville)