Tricky, bel artiste multifacettes et redoutable innovateur n’est pas simple à cerner.

L’exercice de style (s) auquel il nous convie dans son album ultra collaboratif « Lonely Guest » est encore plus difficile à saisir qu’une boule de mercure en apesanteur. Insaisissable.

Il ouvre 10 pistes au sens premier du terme, soit des chemins non balisés vers l’inconnu qu’il faut suivre pour… se perdre.

Je n’ai pas fait le scout un jour, scout toujours mais j’ai sagement écouté les morceaux 4 ou 5 fois dans le métro parisien, bien calé dans un siège, en regardant sans ciller la vaste majorité de mes congénères épuisés au cou baissé s’absorber dans leur écran sans voir ce qui les entoure (ça fait un peu peur, non ?). Après immersion, décantation, réfraction dans la bande originale du master Tricky (voir image ci-après), je suis à la fois séduit et convaincu. Des voix de toutes les couleurs et tous les sexes sont ici référencés dans la révérence.

Voici un étrange mélange de chansons douces ou confidentielles (Under qui apaise, Move Me qui vous réveille avec une gifle), de confidences telles que « the problem with money is that it runs out » (Pay My Taxes) ou d’ambiances vraiment hors du monde des vivants ordinaires (le formidablement lunaire et décalé Atmosphere, featuring -RIP- Lee Scratch Perry), voire de récits surréalistes (le faussement kawaï Christmas Trees) et inquiétants même pour un psychiatre aguerri (Pre War Tension). Ne nous fâchons pas mais Pipe Dreamz et Big Bang Blues auraient leur place et leur couvert dans un album de Massive Attack (au blind test, vous répondriez ça sans ciller !).

Clairement, un album flou (c’est un compliment, hein).

Sincèrement, un opus à plusieurs étages de messages et sous-messages.

Il mérite plusieurs écoutes et mises en tympan, comme vous boiriez un breuvage doux-amer qu’on adore recommander encore et encore à un barman complice. Finir ivre, mais sans s’en rendre compte ?

Du beau bizarre comme aurait dit quelqu’un.

Tricky et vos guests, merci de nous mettre la puce à l’oreille. Il est bon de se secouer les neurones pour mieux les ordonner parfois.

Jérôme « I see a butterfly » V.

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