A défaut de trouver le sommeil la nuit dernière, je m’auto-administrai par le plus grand des hasards un quizz de connaissances sur l’Islande. Et là, je subodore déjà, chers lecteurs de Songazine, vos pensées : ‘’Ce chanvre en provenance de la toundra doit être de piètre qualité pour devoir vous faire triper dans un semblable delirium tremens !’’.
Rassurez-vous tout de go : cette introduction somme toute imprévisible et bizarre n’est qu’un artifice pour vous parler de l’Islande donc, cette ‘’terre de glace’’ battue par des vents froids polaires.
A mon grand désespoir, je ne pus qu’amèrement constater l’état pitoyable de ma culture islandaise, se résumant en tout et pour tout à ces 6 points :
- Le nom de la capitale, Reykjavik ; le premier qui dit ‘’Helsinki’’ ne reviendra pas en deuxième semaine.
- Que le président de la République Islandaise doit sans coup férir avoir un blaze se terminant par ‘’-dottir’’ si c’est une femme ou par ‘’-son’’ si c’est un homme. Transposé à notre pays, les patronymes de nos politiques seraient : François Fillonsson, Benoît Hamonsson, Emmanuel Macronsson, Ségolène Royaldottir,… Bref, vous avez compris.
- Que l’éruption du volcan Eyjafjöll fit le buzz en 2010, bloquant le trafic aérien au nord de l’Europe durant plusieurs jours.
- La notoriété de Arnaldur Indridasson, écrivain de polars romans de gare (comme quoi, circuler quotidiennement sur la ligne 14 du métro – Saint-Lazare-Olympiades – en passant devant le point presse Relay vous cultive un homme).
- Que les supporters des équipes nationales islandaises sont les maîtres incontestés du ‘’clapping’’, même après les branlées infligées par nos Bleus : 5 buts à 2 lors du 1/4e de finale du dernier Euro de foot en 2016 et 31 buts à 25 pas plus tard qu’hier en fin d’après-midi lors des 1/8e de finale des championnats du monde de handball !
- Et que oui, dernière précision, mais non la moindre : il ne faut sous aucun prétexte mettre le cul sur une faille éruptive, sous peine d’être surpris par le jaillissement intempestif d’un geyser et catapulté à 35 mètres de hauteur, sans autre solution que d’implorer le dieu Thor pour la redescente !
C’est peut-être finalement à travers sa scène rock active que l’on connaît le mieux le pays à l’international.
Citons pêle-mêle les groupes anarcho-punks Kukl (‘’sorcière’’ en islandais, formé en 1983), Sykurmolarnir (‘’morceaux de sucre en islandais’’, formé en 1986) qui deviendra bientôt The Sugarcubes (sur le label One Little Indian, encensé par le Melody Maker en 1987) et révélera la personnalité énigmatique de sa chanteuse Björk ; plus récemment, Sigur Rós (formé en 1994, rock progressif) et Of Monsters and Men (2010, indie-pop-folk).
Révélé au public local et à la (dithyrambique) critique en 2014 suite au concert donné lors du festival annuel ‘’Iceland Airwaves’’ à Reykjavik, puis grâce à leur premier effort ‘’A Few More Days To Go’’ la même année, Fufanu pourrait bien être le prochain groupe étendard de l’Islande.
Bon sang ne saurait mentir, Kaktus Einarsson, piquant leader (et chanteur) du groupe, est le fils de Einar Örn Benediktsson (chanteur et trompettiste des… Sugarcubes). Il a assuré les premières parties de Blur lors du ‘’British Summer Time Hyde Park’’ en juin 2015, à la demande expresse de Damon Albarn, gagnant au passage l’estime de Brian Eno. Excusez du peu.
Mais plus que ce pedigree flatteur, c’est bien la musique de Fufanu qui parle d’elle-même.
A l’image de la terre de feu et de glace d’où ils sont originaires, elle est un mélange de saveurs disparates, dont les sonorités se situent aujourd’hui aux confins du triptyque new-wave/cold-wave/post-punk électronique, faisant suite au son cold-techno obscur des débuts.
Les influences de leur second album ‘’Sports’’ (à paraître le 3 février 2017 sur le label One Little Indian), produit par Nick Zinner, guitariste du groupe de rock indé new-yorkais Yeah Yeah Yeahs, sont résolument sombres, la voix est nonchalante et grave.
Comment ne pas y reconnaître, références éculées mais évidentes, les spectres de Joy Division et Bauhaus, le rock krautock de Neu !, et peut-être aussi des sonorités proches de ce que propose aujourd’hui Vlad Parshin au sein de Motorama.
Les groupes islandais n’ont d’autres choix que d’être performants sur scène pour conquérir, en plus du public local tout acquis à leur cause, un public plus vaste, au-delà des frontières islandaises. Fufanu est en marche, entamant son UK Tour (huit dates) dès le 14 février, avant deux autres dates prévues en Norvège début mars.
Il nous tarde de voir passer très prochainement par ici ce nouveau phénomène promis à un avenir bien plus radieux que le ciel islandais !
Claude Le Flohicsson, en mode ‘’Viking’’.