Exclusif Songazine.fr, Mai 2025.PUP, l’Interview

 Juste avant le concert de PUP à Paris, Songazine.fr a pu interviewer Stefan, leader du fameux groupe punk rock canadien !

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 L’une des choses qui m’ont fait sourire en découvrant qu’un nouvel album de PUP allait sortir, ça a été son titre. Ce n’est pas la première fois que vous parlez des chiens, pourtant… avec “Sleep in the Heat” par exemple.
Alors à vrai dire, “Sleep in the Heat” parlait d’un caméléon de compagnie que j’avais. Le clip que l’on a fait pour le morceau, forcément, aurait été plus dur à faire passer avec un caméléon, car tout le monde ne les trouve pas adorables. C’était plus facile avec un chien.

Oups. Ça commence bien !
C’est quelque chose que peu de gens savent.

Quelle importance ont les chiens dans ta vie et celle des autres membres du groupe ?
Une grande importance. Nous avons tous des chiens. J’en ai un et demi en ce moment.

Un et demi ?
Ma moitié a un chien, donc je suppose que je suis son… beau-père. Mais ouais, nous avons tous des chiens et ils représentent quelque chose de vraiment important. Tu sais, le fait d’avoir nommé l’album “Who Will Look After the Dogs” vient d’une phrase dans les paroles qui parle du fait de ne pas se suicider, car tu tiens trop à ton chien. En un sens, c’est un peu ridicule, mais aussi marrant, si tu es capable de plaisanter à propos de genre de sujets sombres… Tout le monde n’en est pas capable, mais moi si.


Justement, les paroles sur ce disque semblent vraiment très personnelles. Elles l’ont toujours été, mais là ça se ressent encore plus. Est-ce que tu t’imposes parfois une limite sur ce que tu peux ou ne peux pas dire dans les chansons de PUP ?

Hum, bonne question. J’essaie de ne pas y penser pendant l’écriture. Ça limite le potentiel des chansons. J’essaie plutôt d’être dans le moment présent, avec moi-même, et d’écrire les chansons que j’ai envie d’écrire, sans me dire “Merde, comment on va le prendre ?”
Là où j’établis des limites, c’est au sujet de ce que je dis dans les médias ou les réseaux sociaux. Je fais aussi attention quand je parle d’une tierce personne. Je fais de mon mieux pour respecter leur intimité, et je garde en tête qu’il y a toujours plusieurs points de vue dans chaque histoire, en étant conscient que le monde ne va pouvoir entendre que le mien. Alors, j’essaie de me regarder dans le miroir, et de parler de moi également. 

C’était comment de travailler avec Jeff Rosenstock ?

Jeff est l’un de mes meilleurs amis. On passe un temps fou ensemble. C’est un type merveilleux. Il a toutes les qualités que tu penses qu’il a. Il est adorable, très créatif, il se soucie de ses amis, de l’état du monde, et il a un grand cœur.

 J’ai été presque déçu de ne pas l’entendre jouer du saxophone sur votre album, car c’est aussi l’un de ses talents, non ?

Oui oui. Il en a joué avec nous sur scène par le passé, mais… non, pas de saxophone sur ce disque. Il y en avait sur le précédent, mais cette fois j’ai tapé du poing sur la table.

 Pourquoi ?

Pour répondre avec humour, c’est que je n’aime pas le son de cet instrument. On dirait un canard qui cancane. 
Pour répondre plus sincèrement : nous avons essayé de produire un album qui sonne vraiment comme nous quatre dans une pièce en train de jouer. Ce coup-ci, on ne voulait pas avoir recours à des techniques et des “trucs” de studio. On voulait juste capter et retranscrire l’énergie de nous quatre. Donc, quasi rien d’autre que les guitares, la basse, la batterie, et le chant. Il y a quelques petites choses en plus mais vraiment peu. Un peu de xylophone, et des parties programmées sur le morceau “Hunger for Death”, que l’on joue en concert. Donc je dirais que l’on peut jouer 98% de ce qu’il y a sur l’album quand nous sommes sur scène.

J’ai l’impression que la production a bien plus de mordant (sans mauvais jeu de mots) que le précédent. Était-ce votre intention ?
Ouais. Comme je l’ai dit, l’objectif était de capter notre énergie. Cette énergie que nous avons à nous quatre lorsque nous jouons, même quand ce n’est rien d’autre qu’une répète. Il y a une magie, une étincelle qui jaillit, qu’il est impossible de contrefaire. L’objectif était donc d’avoir la prise la plus galvanisante possible, sans se soucier de si on se plante. Si l’énergie et la fougue y sont, alors le morceau y est, et il n’y a rien à retoucher. Par le passé, nous nous sommes souvent dit des choses comme “Houlà, j’ai chanté un peu faux là, remédions-y”.

Quand tu es en studio, tu peux tout examiner à la loupe. Tu peux regarder la forme des ondes sonores sur ProTools, pour voir ce qui s’aligne ou pas. Tu peux te réécouter sur des enceintes de très grande qualité, pour déceler ce qui ne va pas. Ce que John Congleton, le producteur, nous a poussés à faire, c’était tout le contraire. Non, on n’examinera pas les ondes sonores ; non, on ne se réécoutera pas sur les meilleures enceintes du monde. Si ça sonne bien, ça sonne bien putain !

Y’a-t-il des choses que vous appréciez particulièrement chez le public français ?

Tu sais quoi ? Votre pays a toujours été épatant pour nous. Quand on a commencé à tourner en Europe, on nous a toujours dit “Ne vous faites pas chier avec la France”. Et pourtant, depuis qu’on a commencé à venir en Europe, Paris a toujours été un temps fort des tournées. Le public est génial. Nos premiers morceaux contiennent pas mal de moments “Woo-hooo”, et ça fait chanter les gens à l’unisson, la foule est vraiment déchaînée et énergique, et je suis vraiment reconnaissant de pouvoir voir ça. Après tout, nous n’étions qu’un petit groupe à la noix qu’on a commencé dans notre sous-sol pour pouvoir faire des concerts locaux, chez nous à Toronto. Je suis reconnaissant de pouvoir venir à Paris, pour donner des concerts complets, et voir les gens être en osmose avec notre musique. Nous avons une chance incroyable.

Est-ce que tu parles un peu français ?

(Parle français) Un petit peu. Il y a une chanson, “Waiting”, qui a une ligne en français. (Repasse en anglais) J’ai appris le français quand j’étais petit. Je savais le parler couramment dans le temps, mais j’ai beaucoup perdu. (Repasse en français) Je vais essayer de parler français sur scène. Je vais essayer, mais c’est merde (sic).

Allez-vous jouer (ou avez-vous joué) des morceaux extraits de votre EP “This Place Sucks Ass” ? Je trouve qu’il est trop souvent oublié dans votre discographie !
Oh, merci. On en a joué certains. “Edmonton” pas mal de fois. “Rot” pendant une tournée. Et “Anaphylaxis” peut-être cinq fois. Je m’attendais à ce que “Rot” suscite plus d’enthousiasme. C’est plus dur quand un morceau vient d’un EP, car les gens le prennent moins au sérieux. Ce n’est pas si grave, moi-même je ne prends pas les EPs des autres groupes au sérieux. De super chansons peuvent se perdre ainsi si elles ne sont pas sur les albums. Donc non, probablement pas de chansons de cet EP ce soir.

Je me souviens d’une interview de vous où vous racontez la genèse de votre second album, “The Dream Is Over”. Il s’agit de la phrase qu’un médecin t’a dite à un moment où tes cordes vocales étaient dans un sale état. Ce qui m’a frustré, c’est que l’on n’a pas le fin mot de l’histoire, avec ta guérison.
Je serais ravi d’en parler. Nous étions donc en tournée, et dès le départ j’avais des soucis de cordes vocales. Au bout d’un moment, elles ont commencé à saigner. La manière dont les cordes vocales font du son, c’est quand elles vibrent et se touchent. Et je ne pouvais plus le faire. J’étais muet. Pas juste rauque ou éraillé. Je suis rentré, et je suis allé voir un spécialiste. Puis j’ai passé un mois entier en étant muet. Je ne pouvais pas parler, pas émettre un son. On se sent très isolé, c’est très dur. Tu te sens seul car tu ne peux pas communiquer. Donc, un mois ainsi, puis j’ai passé plusieurs mois à travailler avec un orthophoniste, pour réapprendre à parler. Une fois que j’ai pu faire ça, j’ai bossé avec un coach vocal pour réapprendre à chanter. Ça a pris sept mois. C’était vraiment délicat, car nous ne gagnions que peu d’argent à l’époque. L’argent que l’on gagnait venait des tournées. Et on ne pouvait PAS tourner. Mais tout a fini par s’arranger. Je peux chanter à nouveau.

As-tu changé quelque chose à ta manière de chanter ?

En quelque sorte. Beaucoup de changements dans mon hygiène de vie, surtout. La manière dont tu traites ton corps. La manière que j’ai eu de chanter, aussi, un petit peu. Mais le style de musique que l’on pratique peut aussi occasionner des dégâts. Peu importe. Je ne peux pas faire semblant. Le tout, c’est de réduire au maximum ces dégâts et bien faire attention à s’échauffer avec un concert, à surveiller son hydratation, à s’assurer des jours de repos… Par exemple, la première fois que nous sommes allés au Royaume-Uni et en Europe, nous avons donné 24 concerts en 22 jours. C’est n’importe quoi. Aujourd’hui, nous alternons quatre concerts et un jour de repos. Ça nous aide.

Y’a-t-il un risque de rechute pour toi ?

Je n’y pense pas. J’ai eu quelques petits soucis, mais rien d’aussi grave. Je crois que ça se passe aussi dans la tête.

Es-tu conscient à quel point les fans considèrent la transition “Tour / DVP” comme sacrée ? Tu as déjà lu des trucs à ce sujet ? C’est vraiment marrant. C’est presque devenu un meme.

C’est marrant, oui. Mais non, je n’étais pas vraiment au courant. J’essaie de ne pas trop lire de choses à notre sujet. Ces deux chansons ne font qu’un. Il nous est déjà arrivé de jouer DVP et Tour ensuite, juste pour charrier. C’était vraiment marrant.

L’esthétique du clip de “Getting Dumber” est… particulier. Tu veux m’en parler un plus ?
Je suis certainement le moins bien placé pour en parler, car c’est Zack (à la batterie) et Nestor (à la basse) qui s’en sont chargé. Moi et Steve, on a participé, mais c’était surtout leur idée. Ils ont un sens de l’humour à la fois tordu et hilarant, que j’adore. Les gens ont moins souvent l’occasion de savourer leur humour que le mien, car moi c’est dans les paroles que ça se passe. Donc si on peut leur laisser la chance de nous concocter quelque chose, c’est toujours super.

Merci !
Merci pour l’interview.

Matthieu Vaillant

Dans le dossier :PUP, the interview ! >>
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