Cet article est le numéro 5 sur 8 du dossier Dossier Steven Wilson

On pourrait couvrir le musicien Wilson d’éloges à propos du génie de ses compositions, son sens de la perfection sonore, ses ambiances envoûtantes ou le supplément d’âme qui court tout au long de sa discographie. On pourrait et on vient de le faire, d’ailleurs. Mais à Songazine on aime, comme tu le sais cher lecteur, la matière littéraire et par chance, Steven Wilson aime aussi la littérature. Il l’aime au point d’en remplir ses œuvres musicales, comme pour son avant-dernier album, The Raven That Refused To Sing, où il avait écrit des contes dans une plus pure tradition victorienne, puis composé ses morceaux autour des histoires.

Pour l’album qui sort cette semaine, Hand. Cannot. Erase., plus de contes mais un concept littéraire plus large, qui inclut une biographie sous forme de paroles de chanson, de livre et de blog.

En effet, inspiré par l’histoire étonnante de Joyce Vincent (cf. l’interview), Wilson l’écrivain décide de prendre le point de vue d’un personnage féminin et d’écrire son histoire. Pas n’importe quelle histoire, puisque cette femme décide de venir habiter en ville pour disparaître aux yeux du monde.

“Where do you go if you don’t belong anywhere?  If I wanted to run away then why come to the city?  Because this is the place to hide. This is the place to be invisible.  Anyone can be no one here, and I am someone that wants to be no one.”

Où aller si vous n’êtes à votre place nulle part ? Si je voulais m’enfuir pourquoi venir en ville ? Parce que c’est l’endroit pour se cacher. C’est l’endroit où être invisible. N’importe qui peut être personne ici, et je suis quelqu’un qui veut être personne.”

Insensible aux tumultes du monde, elle vit seule dans son appartement, observe les gens à l’arrêt de bus en bas, se rappelle son histoire et comment elle a pu vouloir à ce point se détacher du monde. Frappant, son récit devient de plus en plus touchant à mesure qu’on s’immisce dans son mal-être. Étrangère aux autres, étrangère à elle-même, au point d’en devenir presque un fantôme, elle révèle assez subtilement un problème profond qui se terre dans nos sociétés modernes et notre mode de vie fou-furieux.

Prendre le temps de lire le blog (http://handcannoterase.com/, malheureusement seulement en anglais) ou d’écouter le nouvel album façonné avec passion, c’est aussi lutter silencieusement contre une société des apparences, du tout-tout-de-suite, du toujours heureux qui nous plonge dans l’apathie et nous anesthésie frénétiquement le cerveau.

Steven Wilson nous rappelle donc, pendant que Songazine lui envoie un clin d’oeil, que les notes de musique savent si bien s’associer aux mots pour notre plus grand plaisir, mais pas seulement. Il nous parait important alors de défendre ces artistes pensants, critiques, libres d’expression mais aussi libres de montrer le malheur de systèmes qu’on cautionne bien trop souvent.

Pour conclure et comme il l’écrit si bien dans le morceau Ancestral :

“Reason never seems to come to guilty men
Things that meant so much mean nothing in the end
That function is dysfunction and to hide the truth
Distracted by their faith, ignoring every proof”

Les hommes coupables ne semblent pas disposer de raison

Les choses qui avaient tant de valeur ne valent plus rien au bout du compte

Que la fonction est dysfonctionnelle et pour cacher la vérité

Distraits par leur foi, en ignorant chaque preuve

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