Notre envoyé spécial chez Universal a rencontré les instigateurs de la très riche compilation SND.PE V, pardon… Sound Pellegrino Volume 5. Explications et discussion avec deux personnages marquants de la scène House in da Hexagone.
Racontez-moi la genèse de Sound Pellegrino Vol. 5…
Teki Latex / Orgasmic : C’est un CD mixé plus qu’une compilation, en fait ! On a vraiment d’abord eu la vision d’une œuvre musicale constituée de plusieurs petites œuvres mixées ensemble de manière homogène et fluide. On a pioché parmi les gens dont on apprécie le travail, dont on écoute la musique, dont on joue les disques et qui ont parfois travaillé chez nous, déjà fait des morceaux pour nous que ça soit pour des maxi ou des compilations. On leur a donc demandé de faire des morceaux un peu « sur mesure » pour coller à notre vision de ce qu’allait être ce mix. À savoir un truc fluide où les morceaux se superposent facilement. On leur a demandé de faire des choses assez minimalistes pour qu’elles puissent se marier facilement et pour que le tout donne une sorte de « voyage ». Le tout avec un certain nombre de contraintes plus ou moins libres.
Par exemple ?
TL / O Plutôt des contraintes de tempo. Nos artistes devaient choisir de faire quelque chose soit autour de 130 BPM, soit autour de 140, mais pas plus. On savait déjà qu’à un moment, à l’image des DJ sets qu’on fait dans les clubs toutes les semaines, il y aurait un moment du mix où l’on passerait de 130 à 140, assez naturellement. Côté musique, les artistes ont pondu soit un truc purement rythmique, soit un truc purement mélodieux. Ce qui permettait de prendre un morceau avec une mélodie sans beat et de rajouter un beat par-dessus, sans que ça « clashe ». En fait, on est fasciné par l’idée qu’un morceau A plus un morceau B donne un morceau C. C’est un jeu de construction, comme des Lego.
Les précédentes compilations de Sound Pellegrino étaient thématisées ? Ce n’est pas le cas ici, pourquoi ?
TL : Le thème c’est nous en fait. L’homogénéité de cette compile c’est le mix qui la créé. L’exercice du CD mixé était super important pour nous. C’est un truc avec lequel on a grandi, parce qu’on écoutait les CDs mixés de Cut Killer ou de Low Budget quand on était jeune, dans le van de notre tournée avec TTC. C’était à l’époque où on était des rappeurs, et on découvrait la musique électronique grâce aux DJs et donc leurs CDs mixés. Donc c’est un format qui nous tient à cœur. Et même si aujourd’hui plus personne ne fait de CD, il fallait qu’on en fasse un, et c’est celui-là, ha ha !
Ça a été difficile à mettre en boîte ?
TL / O C’est très compliqué parce qu’il faut « clearer » les morceaux. À l’époque de Cut Killer, c’était facile : il passait un coup de fil à deux-trois maisons de disque et tout le monde était très content de pouvoir lui donner des morceaux. Aujourd’hui c’est plus compliqué, surtout pour la musique dans laquelle on évolue. Tout est fait sur des petits labels qui ont pas forcément envie de te laisser utiliser leurs morceaux gratuitement. Ça demande des budgets qu’on a pas forcément. Là l’avantage, c’est qu’on a demandé des morceaux sur mesure qui sortent chez le label Sound Pellegrino, dont on détient les droits. Même si un ou deux morceaux ont justement « pris en otage » la compilation pour une question de droits. Sans eux, on aurait pu la sortir quatre ou cinq mois après avoir commencé, ce qui est exceptionnellement court.
Si vous deviez décrire le CD en trois mots ?
Fluide, antinomique, et ludique. Pour réellement écouter ce disque, je pense qu’il faut savoir lâcher prise, se laisser emmener quelque part. Ça commence un peu bizarrement, avant une vague techno qui te berce, et puis ça finit par partir dans des trucs beaucoup plus compliqués, irréguliers rythmiquement. Faut laisser le contrôle au DJ, tout simplement.
Quelques questions spécial 2016… des bonnes résolutions, sur le plan musical ou non ?
Orgasmic : Oh là là, aucune, jamais. Ça se tient pas. Moi j’en ai pris aucune.
TL : La seule micro-résolution que j’ai prise, c’est d’être plus patient dans mes mix. Moins bourriner, prendre le temps de superposer mes morceaux de manière plus précise, moins brusque.
LA grosse actu pour le label cette année ?
Orgasmic : L’album de Mathias Zimmerman ! C’est le premier LP d’artiste qu’on sort, et on en est super content. C’est quelqu’un qui a toujours eu une vision d’album. Depuis le début de sa carrière, il donne des noms humains à ses morceaux : Bill, Sandra, Jack… Chaque morceau qu’il fait est un petit personnage, et dans sa vision du truc ils habitent tous sur une île qui est l’album. Il est hyper homogène et éclectique. Il travaille avec une certaine palette de sons, il est capable te faire de la techno comme de la pop avec les mêmes sonorités.
Propos recueillis par Matthieu Vaillant