Peter Perrett est un génie.

Un génie mis entre parenthèses pendant près de 15 ans à cause de cette foutue dope. Il n’y a guère que le glyphosate, les cocktails purple drank et les 11 vaccins obligatoires emballés dans de l’aluminium qu’il ne se sera pas enfilés dans le nez !

De longues années d’errance passées reclus chez lui, déconnecté du monde extérieur, happé par un processus d’autodestruction qu’on aurait pu penser irréversible. ‘’Je me suis totalement bousillé, humainement et artistiquement’’.

Un grand classique du ‘’Sex, drugs et rock’n’roll’ me direz-vous !

C’était sans compter sur la résilience de cet anticonformiste (‘’Je n’ai jamais baissé les bras, ç’aurait été trop facile’’), dont les seuls points d’ancrage salvateurs auront été sa femme héllène Zina (Zina c’est son nom ? Mais non, c’est son prénom !) et ses deux fils qui l’accompagnent dorénavant en studio et sur scène, Jamie l’aîné et Peter Jr. le cadet.

C’est l’histoire d’une renaissance et d’un come-back magnifique avec la sortie fin juin 2017 de l’album ‘’How the West was won’’, 21 ans après ‘’Woke up sticky’’ (1996).

Peter-Perrett-LP How The West Was Won

Remontée du temps : Perrett découvre les Rolling Stones, les Beatles et les Kinks à l’âge de 11 ans (en 1963), puis Syd Barrett et le Floyd à l’adolescence, au moment où Londres connaît une vitalité culturelle étonnante (Swinging London).

Deux ans plus tard, il est fasciné par le morceau ‘’Like A Rolling Stone’’, sur l’album ‘’Highway 61 Revisited’’ de Bob Dylan, capable de ‘’véhiculer l’indicible’’.

Son savoir, il le façonnera grâce à ses lectures mais surtout pas à l’école, dont il est renvoyé.

A 17 ans (en 1969), en proie à des disputes familiales et épris d’amour et de liberté, il fugue pendant 6 mois en compagnie de Zina, sa future épouse (qui ne se prénomme toujours pas Hélène, ça va finir par rentrer vous allez voir !). C’est aussi l’année pendant laquelle il écrit ses premières chansons.

En 1976 (il a 24 ans), il fonde The Only Ones, dont de nombreux groupes – The House Of Love, Go-Betweens, Suede, Nirvana, Blur, Lemonheads, Libertines,… -, revendiqueront l’influence dans les 80s et 90s.

Entre période post-glam-rock et pré-punk, le groupe est catalogué ‘’new wave’’. Le premier LP ‘’The Only Ones’’ sort en 1978 (avec le tube ‘’Another Girl, Another Planet’’). Les chansons sont sombres, romantiques, cyniques mais non dénuées d’humour. A la frontière entre Lou Reed, Syd Barrett, les Kinks et Dylan, elles mettent en exergue l’énorme créativité de Perrett.

Suivront deux autres LP : ‘’Even Serpents Shine’’ (1979) et ‘’Baby’s Got a Gun’’ (1980), juste avant le chaos : la pression du label CBS pour sortir un single (ils imposeront un producteur), une tournée US en première partie des Who, marquée par la forte addiction des membres du groupe à l’héroïne et neuf mois d’arrêt pour Perrett, atteint d’une hépathite B, signent la fin du combo londonien.

Perrett stoppe la musique pendant sept longues années, durant lesquelles la dope exécute ses basses œuvres. Il suit une cure de désintox en 1985 et cesse l’héroïne en 1988.

La rédemption est en marche : il réapprend la guitare de zéro, s’occupe de ses enfants et remet son corps en marche à raison de huit heures de football par semaine.

L’écriture de la chanson ‘’Baby Don’t Talk’’ constitue un déclic. Perrett recouvre la foi en l’avenir. The Only Ones se reforment en 2007 et entament une tournée au Royaume-Uni au mois de juin de la même année.

Retour au Mardi 14 novembre 2017 à 21h30 : Peter Perrett, coupe de cheveux résolument 70s, lunettes noires, allure frêle, costume noir rayé, est venu en famille sur la scène du Point Ephémère. Une salle de concerts parisienne d’une capacité réduite de 300 places qui lui sied parfaitement, lui pour qui ‘’la musique jouée dans des stades perd toute sa romance’’.

Accompagné de ses deux fils, Jamie (guitare), aussi survolté et démonstratif que Peter Jr. (basse) est stoïque et placide, de leurs girl-friends Jenny Maxwell (violon, chœurs) et Lauren Munisamy (claviers, chœurs), et de Jake Woodward (batterie), il alterne les morceaux du dernier album (joué intégralement) et des titres 70s de The Only Ones.

La connivence entre tous ceux-là est perceptible. ‘’Jouer avec ses fils est quelque chose de très spécial’’ me confiera-t-il à l’issue du concert ; ‘’Ils comprennent l’esprit des chansons mieux que quiconque’’.

Perrett enchaîne les morceaux de sa voix nasale (pas si abîmée que cela comme j’ai pu le lire çà et là), proche de Lou Reed. Le londonien sexagénaire n’a d’ailleurs rien à envier au new-yorkais en matière de charisme. Et, cherry on the cake, il est nettement plus humble et sympathique !

Le sourire aux lèvres, Peter Perrett est heureux, touché et touchant. Le public est totalement acquis et conquis dès les premières mesures (certains dans la salle ont assisté au concert de The Only Ones au Palace le 28 octobre 1979).

Une fois n’est pas coutume, on se dit en le voyant que la vie et l’amour ont triomphé de la noirceur. L’enfer ne triomphe pas à tous les coups. Peter Perret en est la preuve vivante et enthousiasmante.

J’échange quelques mots avec lui après le concert… Peter est visiblement heureux. ‘’J’ai senti que les gens étaient très proches et chaleureux (warm) ce soir’’. Il m’assure qu’il reviendra très vite sur une scène parisienne.

Ne manquez pas le prochain concert ! Les génies sont si rares…

Peter Perrett - Point FMR - 14.11.2017

 

Alechinsky.

 

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