Cet été 2020, pendant la période de stress climatique caniculaire et de vaste purge aseptique, je me suis plongée dans la lecture de l’ouvrage de Mathilde Brasilier, avec une boule à la gorge. En effet, le titre d’emblée me mettait mal à l’aise, comme résolue à lire l’ignoble réalité et ce mot qui reste au creux du coeur. 

Que peut-il arriver de pire que l’enfance souillée ? Des pages d’une narration à la première personne en ellipses, comme l’inceste qui broie tout, en allusions, tout simplement l’amnésie traumatique qui laisse les souvenirs émerger des décennies plus tard.

Que demander à un être innocent, inoffensif, aimant cherchant à être, avoir, aimer, devenir ? Comment devenir, grandir, dès lors qu’à la racine la psyché emmagasine du conflit originel ?

Cet ouvrage autobiographique de Mathilde Brasilier, journaliste, écrivaine et architecte, soulève une thématique soulevant bien des problématiques et qui a pourtant fait l’objet d’une mise sous silence, une transparence étouffée sous les non-dits familiaux : l’inceste. Ce terme mène à tant de drames, de situations impossibles et de malheur que chaque témoignage est essentiel et thérapeutique.  

L’auteur brise la loi du silence et des secrets de familles pour révéler ce qu’elle a subit avec son frère par cette figure paternelle. Elle fait le point sur le mal-être et bien plus encore sur cette paternité dévoyée qui a attenté aux corps interdits. Le lieu où la jeunesse trouve normalement protection, refuge, amour filial et bien-être est livré dans ces mots, et mon coeur s’est étreint lorsque j’ai appris que le frère de l’autrice s’est donné la mort. 

Entre Mathilde Brasilier et le lecteur s’instaure un échange, une passation de savoir. La puissance derrière les mots est à la mesure de la force d’une histoire résonnant au sein de tant de familles. 

On a envie de faire plus attention, de mieux considérer ce qui pourrait se cacher derrière chaque larme d’un enfant, chaque attitude contraire à ce qu’un petit bout de chou devrait laisser paraître de l’insouciance associée à son rang d’adulte en devenir. 

Le jour, la nuit, l’inceste, L’Harmattan, 28 €

Van Maury-D

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