Un après-midi, dans un café rue des Boulets, à Paris…
« Je voulais réaliser des concerts sur les toits depuis au moins deux, voire trois ans. Je trouve que c’est un cadre de tournage assez chouette », commence Sami Battikh le réalisateur des contes du Paris Perché. L’idée devint réalité il y a un an et demi. Culture Box, la chaîne web de France Télévisions, eut vent de cette manière de filmer des concerts. « Ils ont aimé cette trame sur les hauteurs de Paris, avec une histoire fictionnelle racontée par une personne », poursuit-il.
Nosfell était le conteur pour « cette aventure un peu folle et imaginaire ». Sourdoreille et l’artiste se connaissaient depuis la nuit des temps. « On se fréquentait avant même que notre média existe quand c’était encore les prémices. On a accroché sur son projet artistique », raconte Sami. Ce fut au Printemps de Bourges qu’ils firent connaissance. Fil rouge de Sourdoreille, ils l’ont suivi lors de sessions acoustiques et pour chaque sortie d’album. Le conteur était déjà disposé à s’aventurer : « L’idée des contes ne sort pas de nulle part. Nosfell est ancré dans de nombreuses disciplines artistiques, la danse, le conte et les marionnettes. Il avait lu un poème de Fernando Pessoa pour Culture Box ».
Nosfell engagé, il ne manquait plus qu’à notre réalisateur de choisir les cinq artistes qui viendront « sauver » les différents royaumes du Paris Perché. Ils ont été sélectionnés dans les branches de l’électro, la pop, la folk et le rock. « Nous avions d’abord proposé à l’artiste, avant de présenter à la chaîne ». De nombreux musiciens n’ont été, hélas, retenus. Le conteur de l’aventure avait le dernier mot, « Il disait que ce n’était pas sa came ». Camille, Dominique A et Yelle étaient parmi les prétendants pour cette aventure.
Les toits de Paris, l’endroit où toute cette magie s’opère dans ces cinq épisodes. L’équipe a rencontré quelques difficultés : « De nombreux critères rentraient en jeux : la disponibilité, le prix. Nous avions pensé à des toits de musées ou d’institutions. Le problème était la privatisation qui coutait une somme exorbitante ». La sécurité et l’accessibilité étaient d’autres enjeux. « 100 m², c’était la surface au minimum pour accueillir tout le monde, groupes, figurants, équipes de tournage ». A titre de comparaison, Kid Wise était sur le toit le plus petit de la saison, comparé au 300m² pour les sœurs Ibeyi. Elles étaient situées sur la médiathèque Françoise Sagan, à Paris. Les nuisances sonores ont été redoutées sur le tournage : « Par exemple avec Isaac Delusion où on a tourné de nuit. Il a fallu qu’il chante très vite, sinon le syndic allait porter plainte. Le groupe nous avait prévenu qu’ils joueraient doucement, enfin selon eux », s’amuse notre réalisateur.
C’était juste magnifique, le charme était là…
Icinori ont été les maîtres illustrateurs de cette aventure. Ils ont été choisis par Nosfell, lui-même baignant dans les arts graphiques : « ça n’a pas été dur de les convaincre. Ils sont passionnés de musiques indépendantes », précise-t-il. Un danger les guettait : « On avait peur que cela devienne du Roger Rabbit. Nous ne voulions pas être dans l’artificiel que ça ne choque pas à l’œil et que ça soit cohérent ».
Ce conte musical permet de découvrir la beauté de la musique et le charme de Paris. Par ailleurs, Sami Battikh et son équipe n’avaient pas l’intention de rentrer dans un conte pour enfants. « On assume ce côté féérique et notre part d’enfance à nous, mais on ne s’adresse pas aux enfants. Tim Burton était notre ligne de flottaison », explique-t-il. Le conteur du Paris Perché avait une liberté d’écriture. Parfois, celle-ci prenait des chemins complexes. « On a essayé de simplifier, non pas pour les enfants, mais pour rendre accessible aux fans de la page Facebook de Kid Wise, d’Isaac Desilusion ou d’Ibeyi ».
De nombreux souvenirs se sont logés dans la tête du réalisateur, notamment celui du tournage d’Hindi Zahra : « Il y avait de la magie lors de la réalisation. L’histoire veut que le Soleil ne se couche pas. On l’a tourné pendant la période de canicule de cet été. Tous les techniciens avaient lutté tout l’après-midi. La chaleur n’était pas simulée. Nous avons filmé en fin de journée. Grâce au chant d’Hindi, le Soleil arrive à se coucher et durant le concert, ça s’est passé comme dans le conte », il termine, « On aperçoit l’astre se coucher et à la dernière chanson, nous sommes quasiment dans la pénombre. C’était juste magnifique. Le charme était là »…
Thomas Monot
Bonus lien :
Les sœurs Ibeyi –dernier épisode-