Qui aurait cru que Pontivy, charmant chef-lieu d’arrondissement du centre Bretagne, puisse être une ville rock ?

L’étymologie du lieu aurait dû nous alerter. La légende veut que le moine gallois Ivy s’installe dans le coin vers 700 et jette un pont, avec quelques troncs d’arbres, pour relier les deux rives du fleuve côtier Le Blavet (ar Blavezh), créant ainsi le village de Pond Ivy ; Pond étant le mot breton pour ‘’pont’’ mais aussi le nom d’un groupe de rock psyché australien. Et Ivy, bah rapport à son blaze mais aussi au son lourd, heavy quoi…

Je vous l’accorde, tout ça est un peu tiré par la coiffe !

Pontivy n’est pas encore devenu le Palm Desert des années 90, mais le trio Black Hole Machines s’y emploie. Antoine Le Roch au chant et guitare, Simon Le Tumelin (‘’Tumulte’’ en breton ?) à la basse et Thomas Gautier à la batterie viennent d’autoproduire leur premier EP 5 titres, ‘’Run, Rabbit, Run’’, que l’on qualifiera de rock stoner au son puissant, noir et crasseux.

Artwork Black Hole Machines

On cite les Arctic Monkeys et Nirvana comme étant leurs références ? Nope, nope, nope. On penche plus sûrement vers les Californiens de Sleep et Kyuss (avec un certain Josh Homme à la guitare), groupes phares du stoner rock, et l’énergie sauvage des Stooges en prime.

Vous l’aurez compris, Black Hole Machines, c’est la fureur dévastatrice, un uppercut au menton suivi d’un voyage au tapis compté 10 (comme le volume de l’ampli), la faille Sud-Armoricaine qui bouge et provoque des secousses telluriques, les flots calmes du Blavet qui deviennent tsunami, puissance et distorsion à tous les étiages, et vous bottent le cul jusqu’à l’embouchure de l’Atlantique dans la rade de Lorient !

Black Hole Machines, c’est le MC5 de ‘’Motorcity is burning’’ qui muterait en MC56 (comme le département du Morbihan) en chantant ‘’Pontivy is burning’’.

Black Hole Machines

Un conseil de ton ami chroniqueur, cher lecteur de Songazine : ‘’Va te filtrer les cages à miel car ça va riffer sévère dans toute la vallée !’’.

‘’Kill Me Now’’, premier clip du groupe, démarre comme le ‘’Young Men Dead’’ des Black Angels. Le morceau ne dépareillerait pas lui non plus sur la BO de ‘’True Detective’’. La ligne de basse est anormalement légère mais omniprésente, la batterie bien trop taiseuse mais la voix nasillarde et lancinante plombe l’ambiance, déjà pesante, poisseuse, bientôt très lourde, annonciatrice de l’imminence du malheur. Et la violence qu’on sentait poindre arrive en deux vagues successives – à 2’33’’ et 4’17’’ -. Préparez-vous, vous n’en ressortirez pas indemnes. A l’image du carnage sanglant perpétré par le clown tueur dans le clip ‘’Black Grease’’ des Black Angels.

‘’Hold On To Your Gun’’ sonne comme une chevauchée meurtrière (encore) et vous prend à la gorge dès le début pour ne plus vous lâcher pendant 3’30’’.

‘’Tell Me Why’’ vous tient en haleine par les sons de guitares saturées et son insistance anxiogène.

Les dénivelés sonores sur ‘’Down The Hill’’ vous embarquent au son de la batterie omniprésente.

Et lorsqu’on pense toucher à la fragilité du trio sur ‘’Too Shy To Love You’’, ils vous catapultent de plus belle contre le mur (forcément en granit) du son. Bref, leur façon bien à eux de proclamer un message d’amour. Assurément passionné et agité.

Pour reprendre le mot d’acteur servi par Raoul Volfoni/Bernard Blier dans les Tontons Flingueurs : Black Hole Machines, ‘’faut r’connaître, c’est du brutal !’’.

Allez, ‘’cours, petit lapin, cours’’ vite te réfugier dans ton terrier. Les terres pontyviennes ne sont plus aussi calmes depuis quelque temps.

 

Alechinsky.

© Image à la Une : Pontivy Journal

 

 

 

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