Suzane

Je suis une conteuse d’histoires vraies sur fond de musique électro: C’est par ces mots que Suzane se présente, et on ne peut qu’acquiescer. Des histoires, elle en a  beaucoup à raconter, comme en témoigne son premier album Toï Toï.

Au travers des quatorze titres qui composent son premier opus, elle s’érige en témoin d’une époque qui, bien qu’en pleine effervescence, comporte son lot de noirceur. Les phénomènes de société sont alors mis en scène avec justesse,  mais  L’Artiste y apporte un certain éclat au travers des chorégraphies qui animent ses clips.

En choisissant de faire coïncider la musique électro  à la danse contemporaine, Suzane explore des chemins en marge de tous codes, et s’içnscrit dans un processus expérimental.

La liberté semble être le maitre mot de son œuvre qui véhicule avec une grande sensibilité les émotions qui l’animent.

Après s’être déhanché une énième fois au rythme entrainant de Monsieur Pomme, nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec l’Artiste.

– Bonjour Suzane ! Vous avez participé il y a quelques jours au Festival des Escavatiers. Comment c’était ?

C’était super chouette ! L’ambiance était au top, et même si les personnes présentes portaient un masque cela ne les empêchaient pas d’être très communicatives et de danser ! Il y a eu un réel lâcher prise.                   

– Le lâcher prise auquel vous faites allusion a d’ailleurs permis au public de s’immerger dans  votre univers … A ce propos, comment le décririez-vous ?

En un mot, je dirais qu’il est singulier. Je mélange des choses qui, a priori, ne sont pas conciliables. Mes compositions peuvent paraitre déstructurées …

– Vous avez  d’ailleurs fréquenté le conservatoire un certain temps avant de laisser tomber ces études peut être un peu trop .. académiques. Peu de temps après vous découvrez l’électro…

A cette période je commençais à sortir de plus en plus, et les clubs que je fréquentais passaient beaucoup de titres électro. Lorsque j’ai découvert cette musique  j’ai eu une vraie claque !

– Votre album Toï Toï est sorti le 24 Janvier dernier. Il signifie bonne chance en Allemand. Pourquoi ce choix ?

C’est un terme qui est lié à mes premières scènes !  Le fait de le répéter avant les représentations  me donne du courage. C’est la raison pour laquelle je l’ai choisi comme titre pour mon premier album : cela était une évidence.

Pochette de l’album Toï Toï

– Vous le présentez comme un portrait du monde dans lequel vous vivez ; Pourriez vous nous en dire plus ?

Je me suis nourrie de mes expériences pour l’écrire.  J’ai été serveuse un certain temps à Paris et ma sensibilité était à ce moment là  exacerbée. Cette profession m’a en quelque sorte permis d’être un témoin  de l’époque que nous traversons.

– Vous y abordez également différents portraits de femmes ( Suzane, Anouchka…). Est-ce une manière de revaloriser le statut de la  femme dans la société, et au sein de l’industrie musicale ?

Je pense que c’était naturel pour moi d’écrire à propos des femmes. J’avais également envie de déconstruire les images de la femme qu’on retrouve dans beaucoup de textes, et dont les héroïnes sont toujours belles. Je voulais montrer qu’il y avait autre chose et que ça ne s’arrêtait pas seulement au physique.

– Est ce que le fait d’être une femme a été pour vous un frein dans votre carrière ?

Non, je n’ai pas ressenti d’hostilité particulière, il faut dire que j’ai la chance d’être bien entourée. En revanche, je ne peux pas nier le fait que l’industrie musicale est essentiellement composée d’hommes. J’espère qu’un jour, il y aura une réelle parité.

Pour en revenir à votre album, Il vous a permit de recevoir le prix de la Révélation 2020 aux Victoires de la musique. Avec le recul, comment appréhendez-vous cette récompense ?

J’ai évidement été très touchée et cela m’aide à positiver pour la suite ! Même si j’ai trouvé un peu difficile le fait de ne pas avoir pu honorer ce titre  sur scène, compte tenu de la situation particulière que nous traversons…

– A ce propos, pensez vous que le confinement a été propice à la création ?

Lorsqu’il a été annoncé, j’ai vécu cela comme un événement très brutal.  J’ai tout de même souhaité être productive mais au début, je ne parvenais pas à écrire. Au fil des semaines, je me suis adonnée à une véritable introspection, ce qui m’a permis d’aborder certaines  choses de manière plus positives et à donner formes à mes émotions sur le papier.

– Vous avez d’ailleurs réalisé un feat avec Grand Corps Malade à ce sujet : Mesdames…

Oui ! Il sort le 11 Septembre. J’ai hâte que les gens le découvrent. J’ai toujours aimé les textes de Grand corps. Nous nous sommes rencontrés lors d’un festival à la Réunion et on a vite accroché. Le texte a en effet été écrit durant le confinement.

Pourriez-vous nous parler de la réalisation du titre Les Quatre coins du globe ?

Justement, c’est un morceau qui a longtemps fait écho au confinement. Comme beaucoup de personnes j’avais envie de sortir de chez moi et de voir autre chose, de voyager. A défaut de pouvoir bouger, j’ai entrepris un voyage… sur Google maps que j’ai eu envie de partager. En ce qui concerne le clip je trouve le rendu très frais, et l’équipe avec laquelle je l’ai tourné est top.

On connait vos morceaux, mais on connait aussi le personnage de Suzane, à travers votre tenue de scène reconnaissable. Avez-vous parfois l’impression de jouer un rôle lorsque vous êtes sur scène ?

Je dirais plutôt le contraire. Lorsque je suis sur scène je me sens libre, et en phase avec moi-même. Cette combinaison me  permet d’être moi, avec toute mon énergie. Je m’exprime peut être moins facilement dans la vie quotidienne …

– Vous semblez également très attachée à la danse, comme en témoigne votre scénographie lors de concerts, ainsi que vos clips. Quel rapport entretenez-vous avec cet Art ?

Je danse depuis mon enfance. J’ai eu un véritable coup de cœur pour cet Art que je pratiquais presque de manière quotidienne. Cependant, je lui ai tourné le dos un certain temps. La lassitude s’était installée, et je ne le pratiquais plus avec la même passion. Peut être était-ce aussi dû à mon rapport au corps…

Lorsque j’ai réussi à prendre un certain recul sur cela, je me suis rendue compte que c’était quelque chose d’essentiel dans ma vie et j’ai eu envie qu’elle fasse partie de mon univers, ce qui se retrouve dans mes clips.

– Quels sont vos futurs projets ?

Il y a une réédition de mes titres qui est prévue prochainement. J’ai aussi hâte de pouvoir honorer les concerts qui étaient prévus. Il y aura une tournée en 2021 ; et Grand Corps Malade fera partie de l’aventure !

Quelque chose à ajouter ?

Je voudrais remercier toutes les personnes qui écoutent mes chansons. J’ai hâte de me dévoiler encore plus ! Je suis également contente que mes textes trouvent une résonance chez les gens, et qu’ils s’identifient à ce qui est écrit.

Suzane photographiée par Célian Ramis lors d’un concert.

Emma Forestier.

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