En fait, un bon bouquin, comment le définir ?
Cette évaluation toute subjective est définie par de multiples critères et je dirais que l’un de ceux qui reviendra est : on s’en souvient longtemps.
C’est donc le cas pour celui dont il va être question ci-après.
Agullo se lance dans les recueils de nouvelles aka Agullo Court et inaugure sa collection avec Presqu’îles de Yan Lespoux. Moins de 200 pages, mais dense ouvrage !
L’auteur est un expert ès romans noirs et polars et nous livre ici un premier recueil de textes brefs qui sont tranchants, vifs, laissent une marque comme un coup de cravache.
L’ensemble des histoires ici racontées dans un style bref, direct, « à l’os » se situent dans les Landes du Médoc ; vous tapez ça sur votre moteur de recherche favori et vous trouverez.
Un « pays » plat, bordé de dunes, de forêts de pins, bord de mer face à l’Atlantique ; il y a des lacs et nous apprenons que l’humidité hivernale y est élevée. Hmmm me direz-vous, alors… région sympathique ?
Hé bien, grâce à la plume acide et lucide de Yan Lespoux, j’ai envie de vous dire (comme dans Trip Advisor, vous savez les titres des commentaires à 1 sur 5) : « Fuyez ! ».
En effet, ses récits sans concession révèlent à vif une galerie de personnages qui font assaut de méchanceté, racisme, cupidité, alcoolisme, égoïsme, ambitions ratées, aigreurs, jalousie, goût du massacre sans limite dès le plus jeune âge des animaux à plume et à poil (on appelle ça des chasseurs), voire de leurs semblables tant qu’à faire.
Vous n’êtes pas du (petit) coin ? Vous êtes « bordelais » (pouah !) « toulousain » (noon !), « parisien » (berk !) voire « arabe » (surtout si vous êtes originaire de la Réunion, c’est fin). C’est beau, non ?
On y préfère crever la gueule ouverte que de révéler son pathétique coin à champignons, le mépris profond pour autrui semble le dénominateur commun de ces êtres. Seule note un poil positive, une propension à donner des surnoms à leurs copains. Bon, le plus souvent un surnom bien méchant et… à vie, il ne faudrait quand même pas qu’un peu de bienveillance (un truc de bordelais ou parisien, sans doute ?) s’immisce entre deux tournées de Ricard et de pâté gras.
Car, soyons clairs, voir un noyé les fait marrer et couler un Terre-Neuve dans les baïnes à peine ricaner : magnifique peuplade.
Toute cette noirceur dont l’odeur rance et les bruits grinçants sont parfaitement décrits par Yan Lespoux compose un fort solide panel de nouvelles qui s’entrecroisent, sont enchevêtrées et vous marqueront.
Car, oui, de mon humble point de vue, c’est un clairement bon bouquin, Presqu’îles.
Jérôme «7.8. » V.
PS : même si vous m’offrez des vacances là-bas, je n’irai pas !