Les albums-concept, vous connaissez ? Oui ? Non ? Peut-être savez-vous instinctivement ce que c’est mais sans pouvoir nommer d’exemples.
Alors allons-y pour la partie définitionnelle et pédagogique. Un album-concept, c’est un disque qui a vocation à être plus qu’une simple collection de chansons. Bien évidemment, on rétorquera que tous les albums de tous les artistes du monde sont un peu plus que ça, car tous sont bien sûr liés par des thèmes, une production, un line-up. Un album n’est autre que la photographie d’un groupe ou d’un artiste à un instant T.
Mais tout de même. Certains ont décidé d’aller plus loin, et se sont dits que quitte à nous inviter dans leur monde musical le temps de quelques dizaines de minutes, autant en profiter pour raconter une belle histoire au passage.
La musique metal est loin d’être avare en albums-concepts. Et c’est justement avec cette double casquette de conteurs / musiciens que les danois de Manticora ont abordé tous leurs albums. Un peu à la façon des bardes de l’ancien temps en fait.
L’on commence donc avec la doublette Roots of Eternity / Darkness With Tales To Tell. D’excellents albums, mais dont le concept est un peu flou. L’inspiration Lovecraftienne est là mais difficile de comprendre saisir l’ensemble de ce qui nous est conté. Malgré ce côté un peu flottant, le concept est ici fort bien utilisé pour donner une impression à la fois épique et fiévreuse. Blind Guardian se débrouille pas mal non plus dans ce rôle, d’ailleurs, mais c’est plutôt chez Tolkien que ça se passe.
C’est au détour du troisième album que les choses deviennent bien plus velues. Hyperion. Oui, oui, vous avez bien lu, les danois ont choisi de mettre en musique le cycle de science-fiction du grand Dan Simmons. Étant donné le clusterfuck absolu que représentent ces bouquins (par ailleurs très bons), l’album ne peut en faire une retranscription exhaustive, et un détour par la case lecture s’imposera… et permettra bien mieux de comprendre les choix artistiques faits par Manticora : pourquoi une mélodie orientale sur »Keeper of Time », pourquoi de la voix féminine par-ci…
Puis vient 8 Deadly Sins. On sort les claviers plus que jamais pour donner à ce quatrième album une dimension opératique et tragique de tout premier plan. Un homme mourant se remémore sa vie à travers huit péchés commis à différentes époques. Un des meilleurs albums du groupe, à n’en pas douter, le plus mélodique en tous les cas. »Help Me Like No One Can » ou »Playing God » devraient vous en convaincre.
Retour à Lovecraft et à une ambiance plus grisonnante avec la doublette Black Circus. Le premier album a la particularité d’être écrit… sous forme de lettres. Et oui, Manticora a lancé le power prog metal épistolaire. Exit le concept même de refrain donc, puisque dans une chanson, on ne répète pas trois ou quatre fois la même chose. De nombreux interludes, les »Intuneric », viennent maintenir la tension et faire progresser l’intrigue. Un superbe album à l’histoire très intriguante… la partie 2, en dépit de sa qualité musicale, part un peu en vrille niveau intrigue, et conclut l’histoire de manière assez brouillonne. Dommage.
Passons brièvement sur »Safe », qui est sans doute l’album le moins conceptuel de Manticora pour nous concentrer sur le disque que le groupe défendra demain soir : »To Kill To Live To Kill ». Cette fois-ci, nos bons danois ont décidé un livre écrit… par le chanteur lui-même. Hé oui, on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. Je n’ai pas encore eu la chance de pouvoir le lire, mais étant donné l’ambition et la tonalité très sombre de l’album, nul doute que l’on est sans doute assez loin de »Tchoupi au bord de la mer ».
Quoi qu’il en soit, rendez-vous demain pour replonger la tête la première dans ces univers de fiction, qu’ils soient fait maison, Lovecraftiennes ou Simmonesques, mais toujours brillamment mis en musique par Manticora.
Matthieu Vaillant
MANTICORA en Concert le 9 mars à Paris, La Boule Noire !