Avant de commettre la pochette de ‘’My Beauty’’, album de reprises sorti en 1999, Kevin Rowland, natif de Wolverhampton dans les West Midlands, jouissait d’une sacrée réputation en tant que frontman des Dexys Midnight Runners.

Le tubesque ‘’Come On Eileen’’ (1982) résonne encore dans nos têtes comme un hymne rassembleur et dansant, que l’on aime à entonner à tue-tête dans les pubs de Temple Bar à Dublin autour d’une pinte de Guiness.

Mais ça c’était avant. Avant la séparation du groupe en 1987 et la sortie de son premier album solo ‘’The Wanderer’’ la même année, qui se soldera par un four monumental.

Que s’est-il donc passé dans la tête de Kevin Rowland pour qu’il nous dévoile à 46 ans autant de son intimité, bas et porte-jarretelles, buste glabre, cheveu court et oreilles décollées ?

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Car, autant l’admettre, là où les accoutrements – tenues féminines criardes, talons hauts et paillettes dans les cheveux – portés outrageusement mais avec une classe glam rock par les New-York Dolls faisaient mouche, la dégaine patentée de l’ami Rowland prête plus volontiers à la bouffonnade et au foutage de (sa) gueule !

Les plus intellos parleront de ‘’mauvais choix artistique’’, les plus funs d’une belle pochade sciemment orchestrée par le chanteur illuminé, les gens de marketing y verront un buzz détonant et les fans les plus inconditionnels s’en foutront comme de leurs premières Dr. Martens.

Des signes avant-coureurs auraient toutefois dû alerter plus tôt sur le fétichisme vestimentaire de ce personnage baroque, qui demanda à ses groupes de se vêtir en cabans, vestes de cuir et bonnets de laine, avec de lourds sacs de voyage à l’époque de ‘’Searching for the Young Soul Rebels’’ (1980), en anoraks, catogans et chaussures montantes lacées (1981) ou encore en costumes trois-pièces à l’époque de ‘’Don’t Stand Me Down’’ (1985) (*).

Sans faire plus d’ingérence sur le vestimentaire, on préfère le Kevin Rowland version salopette en jeans sur ‘’Too Rye Ay’’ : certes moins accrocheur de prime abord mais indéniablement plus sexy et d’une intemporalité manifeste 36 ans après sa sortie !

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Passée cette entrée en matière peu réussie sur le plan visuel, ‘’My Beauty’’, qui se vendra tout de même à plus de 20.000 exemplaires, reçut à sa sortie un accueil partagé, mais il mérite d’être réhabilité en ces colonnes tant la critique, à notre avis, eut la dent (trop) dure à l’époque.

On découvre en effet la sublime voix de crooner de Rowland, bien loin de ses accents new wave sur ‘’Too Rye Ay’’ sur la cover de ‘’Reflections Of My Life’’ (1969) du groupe écossais Marmalade (1969), une des plus belles et poignantes love songs ‘’of all times’’ avec ‘’God Only Knows’’ des Beach Boys (dont Michael Bublé, ce fossoyeur vocal, commettra une version aussi déprimante et ennuyeuse qu’un dimanche d’automne pluvieux à Maubeuge).

Son interprétation sur ‘’Daydream Believer’’ des Monkees est brillante et on imagine que les supporters liverpuldiens ne renieraient pas la jolie reprise de  »You’ll Never Walk Alone » morceau est devenu l’hymne du Liverpool Football Club) de Gerry and The Pacemakers (1965).

Rowland avouera que cet album l’aida à sortir de la dépression et de sa toxicomanie.

N’est-ce pas là l’essentiel finalement ?

Alechinsky.

Tracks :  »The Greatest Love of All » (Whitney Houston) –  »Rag Doll » (The Four Seasons) –  »Concrete & Clay » (Unit 4 + 2) –  »Daydream Believer » (The Monkees) –  »This Guy in Love With You » (Herb Alpert) –  »The Long and Winding Road » (The Beatles) –  »It’s Getting Better » (Cass Elliot) –  »I Can’t Tell the Bottom From the Top » (The Hollies) –  »Labelled With Love » (Squeeze) –  »Reflections of My Life » (Marmalade) –  »You’ll Never Walk Alone » (Gerry and The Pacemakers)

(*) cf Le Nouveau Dictionnaire du Rock sous la direction de Michka Assayas, collection Bouquins, 2d. Robert Laffont, 2014.

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