A l’oreille le soleil a commencé à briller de ses rayons dorés lorsque j’ai écouté l’EP Preto i Branco de Djêu, enregistré dans les studios de LA CLEF et sorti le 4 mars lors de leur concert en première partie de Mariana Ramos au Sax à Achères. Découverts l’année dernière lors du festival Afro-Brasil à la Clef de Germain en Laye, et redécouverts en premiere partie de Calypso Rose, aussi à La Clef en octobre 2016, Mónica Landim, au chant et percussions, Valdir Lima et son frère Elton Da Cruz Lima à la guitare, chant et percussions, Fernando De Almeida à l’accordéon et Stefano Guiot à la contrebasse, unis en un jeune groupe d’à peine un an ravissent bien plus que les oreilles, ils donnent envie de partager à la vue la joie, la bonne humeur d’un sourire ou d’un toucher de sol le temps d’un pas de danse aux sons mettant à l’honneur la culture lusophone du Cap Vert.
Avec Djêu, la barrière de la langue portugaise n’en est pas une si on la franchit en musique. Leur répertoire s’inscrit dans l’atmosphère musicale protéiforme de la République des îles du Cap-Vert, Etat insulaire d’Afrique de l’Ouest, dont le portugais, langue officielle, se parle en plus grande part avec le créole capverdien.
En ouverture, point de mots, mais Dedicod valorise l’accordéon et les cordes tapissées par des mouvements bercés par le va et vient de percussions dédiés aux sonorités capverdiennes où c’est le son qui prend la parole jusqu’au chant du deuxième titre, Caminho Inverso. C’est là que je me mis à chantonner en essayant d’accompagner au mieux le talent au cœur « coração » du jeu entre la voix mélodieuse de Mónica Landim et les sons de ses camarades musi(vo)caux.
L’alchimie et l’harmonie, qui ancrent les grands groupes dans le temps et la mémoire, est la valeur ajoutée de Djêu et de leur musique à haut pouvoir euphorisant, telles les sonorités festives de Mas Pa Li qui clôt l’EP, en l’espace de quelques morceaux de vie et de poésie en mots. C’est bien la poésie qui rythme la pulsation de Turbulensa, jusqu’aux rives de la musique cubaine de carnaval ou de la marcha brésilienne, une pointe de mélancolie à la surface des mots, et la poésie qui comme la mélodie transforme le temps et l’espace, « Melodiâ pa transforma tempural na poeziâ ». Ecrite et interprétée par Nitu Lima et Mayra Andrade, la version de Turbulensa de Djêu nous transporte sur des flots bien maîtrisés de la vie métaphorisée en tant d’expériences qu’il y a d’eau dans les océans.
Souhaitons-leur bon vent dans les instruments et que leurs rythmes coulent longtemps à flots de mots luso.
Vanessa Maury-Dbs