CKRAFT, c’est l’alliance du Jazz porté par le saxophone ténor (Théo Nguyen) et l’accordéon (Charles Kieny), aux riffs d’une guitare (Antoine Morisot) et d’une basse (Marc Karapetian) influencés par la puissance du métal. La batterie (de William Bur) donne l’impulsion rythmique à l’ensemble pour nous entrainer dans un univers atypique envoûtant.
Retenus pour les finales régionales des iNOUïS du Printemps de Bourges en Lorraine, le groupe est également en studio afin de terminer leur premier album et un single, Drowning Tree, est sorti le 19 Février. Si l’accordéon augmenté de Charles (accordéon équipé de capteurs électroniques) y occupe une place de premier plan, nul doute que ce premier morceau illustre tout autant la virtuosité de chacun des membres du groupes qui semblent être en parfaite osmose.
Nous avons rencontré Charles, qui a accepté de répondre à nos questions afin de nous éclairer sur l’avenir d’un des groupes les plus prometteurs de la nouvelle scène.
Bonjour Charles ! Merci d’avoir accepté notre invitation. Tu es musicien, accordéoniste et fais partie de plusieurs projets. CKRAFT est celui que tu as fondé ; comment as-tu rencontré les autres musiciens qui composent le groupe ?
Merci à toi de me recevoir ! J’ai rencontré les membres de CKRAFT au fur et à mesure de mes études aux Conservatoires de Metz et de Paris. Nous avons des univers assez distincts : la section rythmique guitare basse batterie est branchée Métal, le saxophoniste et moi avons étudié le jazz, et c’est ensemble que nous travaillons sur la complémentarité entre ces deux mondes.
La fusion Jazz métal n’est pas la plus commune …
Il s’agit en effet de concilier des univers musicaux à priori assez éloignés, c’est ce que j’essaie de faire quand je compose pour CKRAFT. Lorsque j’étais adolescent j’écoutais quasi-exclusivement du Métal (Gojira, Meshuggah, Lamb Of God, Machine Head, Slipknot, etc.) c’était la seule musique qui me faisait vraiment vibrer. Dans la même période j’ai vu jouer un big band et suis tombé amoureux du Jazz et de la folie qui y est exprimée. J’ai fini par ressentir un lien très fort entre les deux genres : une rage de vivre, un cri de liberté, un côté tribal parfois.
Quels sont les artistes qui vous ont influencés ?
Meshuggah et Gojira en ce qui concerne les compositions. On aime marteler des gros riffs à l’unisson avec un son très lourd, profond et gras, et quand Théo arrive dessus avec un solo de sax je pense que les plus connaisseurs reconnaîtrons l’influence de John Coltrane !
Je suis parfois influencé par Fredrik Thordendal (le guitariste de Meshuggah, NDLR) dans mes solos d’accordéon – la preuve en images! –
Notre bassiste Marc est influencé par des musiques rythmiquement très exigeantes, comme celle de Tigran Hamasyan, avec lequel il va d’ailleurs tourner cet été et enregistrer son prochain album.
Comment ça se passe au niveau de la composition ?
Si on veut décortiquer CKRAFT, on peut percevoir les univers du jazz et du métal d’un œil distinct : on a un son très grave dans le power trio (guitare, basse, batterie), ce qui est propre au Métal, le sax et l’accordéon sont plus Jazz. On utilise des mélodies issues du chant grégorien pour cimenter les deux univers. Les chants grégoriens forment un matériau musical hyper puissant, ils ont traversé les siècles et s’extraient aujourd’hui de leur contexte religieux d’origine pour être associés à des éléments de culture populaire. De nombreux compositeurs s’en sont servi dans la musique classique, dans les musiques de films et de jeux vidéos (cf.L’histoire du célèbre chant grégorien « Dies Irae » et son influence sur la culture populaire), et aujourd’hui CKRAFT s’en sert pour fédérer Jazz et Métal.
Le saxophone donne parfois l’impression d’être utilisé comme une ligne de chant dans certains morceaux …
En effet, on a pris le parti de faire de CKRAFT un groupe instrumental, et le rôle du saxophoniste peut parfois s’apparenter à celui d’un chanteur de métal très énervé ! C’est d’ailleurs un de nos plus grand kiff quand il n’y a même plus de mélodie, qu’il fait juste hurler son sax au milieu de la débâcle de saturation des guitares d’Antoine et Marc.
Evoluer en dehors des tendances du marché de la musique ne vous effraie-t- pas ?
Absolument pas. À vrai dire je pense que notre musique est tout à fait diffusable en concert et en radio et le fait d’évoluer en dehors des sentiers battus n’est pas quelque chose qui nous fait peur, au contraire : on a confiance en ce projet et on est sûrs qu’à terme il trouvera un public fidèle.
Le fait d’avoir été retenus pour les iNOUïS du Printemps de Bourges alors que le projet n’avait même pas 6 mois d’existence montre déjà un intérêt parmi un jury de professionnels habitué à des musiques moins expérimentales, et je pense qu’en France particulièrement il y a de la place pour des musiques originales et inédites (je pense à Magma, Igorrr, Guillaume Perret, ou encore Ibrahim Maalouf qui remplit des Zenith!)
Pourquoi avoir choisi d’intégrer un accordéon au sein du groupe ?
C’est mon instrument principal et j’ai toujours voulu intégrer l’accordéon dans des contextes où on ne l’entend pas souvent. De manière générale les autres projets dans lesquels je joue sont assez originaux (Sayag Jazz Machine par exemple, qui est un groupe Electro-Jazz-Drum’n’Bass)
Aussi, étant fan de musiques amplifiées, j’ai fait installer un système de capteurs électroniques sur mon accordéon, qui me permet de diriger toutes sortes de synthétiseurs. J’appelle ça un « accordéon augmenté ».
Comment as-tu découvert cet instrument ?
Enfant je faisais de l’accordéon pour faire plaisir à ma grand-mère, qui en avait un en stock au grenier ! J’ai vite abandonné au profit de la batterie. Je n’ai renoué avec cet instrument que plus tard, vers mes dix huit ans. Pour moi, c’était une évidence, il fallait que j’amène cet instrument dans les musiques que la batterie m’avait fait découvrir.
Pourrais-tu nous parler de Drowning Tree ?
Drowning Tree est notre premier single, il est disponible sur les plate-formes de streaming (ici). C’est le premier morceau entier qu’on a enregistré ensemble, dès notre première session de travail, et il est très honnête, très brut de décoffrage, une belle manière d’aborder CKRAFT !
Que retenez-vous de votre expérience et de votre passage aux iNOUïS ?
C’était une super expérience, ils nous ont donné les moyens de travailler le son et les lumières grâce à la salle Le Gueulard Plus (Nilvange, 57) et présenter un beau show devant une cinquantaine de professionnels de la musique en région Grand Est à l’Autre Canal (Nancy, 54). C’était notre premier concert, on était ravi de partager ça avec un public malgré le contexte actuel de pandémie et de restrictions et on a eu de très bons retours.
Quels sont vos futurs projets ?
Nous avons hâte de nous produire sur scène et de voir comment notre musique va être accueillie par le public, pour l’instant nous mixons notre premier album (sortie prévue en 2022), il s’appellera « Epic Discordant Vision » et réservera de belles surprises, alors abonnez-vous !
CKRAFT en un mot ?
En un mot c’est difficile. Je dirais que les trois mots du titre de l’album à venir nous résument bien, mais s’il faut en choisir un seul, je dirais « épique » !
Retrouvez CKRAFT ici:
https://linktr.ee/ckraft.music
Emma Forestier.