Yunyeong, trentenaire sans diplôme, encombrée d’un bébé et d’un concubin oisif, n’a jamais connu que la précarité. Elle trouve un emploi de serveuse dans un restaurant où il lui est rapidement proposé de prostituer.

Commence alors une vie plus sordide encore où l’hypocrisie le dispute à la solitude. En Corée du Sud, où le taux suicide est le plus élevé des pays de l’OCDE, le sort des jeunes est peu enviable : pression insupportable sur la réussite scolaire, faible accès au marché du travail, inégalités sociales insurmontables… Celui des jeunes femmes l’est encore moins dans une société très patriarcale où les lois consacrant l’égalité entre les sexes sont très récentes.

« Bienvenue » dépeint sans pathos et avec une certaine froideur l’impasse dans laquelle se trouvent celles qui ne réunissent pas les conditions déraisonnablement exigeantes de la réussite à la coréenne dont l’argent est l’alpha et l’oméga. Si ce roman peut paraître éloigné de ce qui nous est montré au travers de la pop culture du pays du matin clair, il illustre l’impitoyable dureté du message délivré aux jeunes Coréens : réussis ou meurs.

Les documentaires sur les apprenties stars de K-pop et les séries sur le monde du travail ne disent pas autre chose, une fois enlevées les paillettes. D’une âpre concision, « Bienvenue » se lit d’une traite et prend aux tripes. En le refermant, on a bien envie d’aller casser la gueule au capitalisme et au patriarcat, en Corée ou ailleurs. On ne peut donc que recommander la lecture d’un ouvrage aussi inspirant en cette période de bonnes résolutions.

(Bienvenue, de Kim Yi Seol, traduit du coréen, éditions Philippe Picquier)

Henriette de Saint-Fiel

Kim Yseol BIENVENUE

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