C’est dans une Sirène complète qu’Ibrahim Maalouf – qu’on ne présente plus – s’est produit deux soirs de suite. Samedi et dimanche derniers, le trompettiste était dans la cité rochelaise pour promouvoir son dernier album, S3NS.
Onzième du titre, S3NS – comprenez « sens », nous invite tout droit à décupler nos sens.
Sur scène, quinze hommes. Quinze raisons de faire un son extraordinaire. D’ouvrir nos cinq sens… ou d’en créer des nouveaux…
Dès les premières notes, on part en voyage. Direction, l’Amérique du Sud. A Cuba ou au Chili, là où vit une partie de la famille de l’artiste franco-libanais. Les musiques sont ensoleillées et pleines d’espoir. Sur son dernier album comme sur scène, Ibrahim Maalouf s’entoure de nombreux autres virtuoses. On note les pianistes cubains Harold Lopez Nussa, Alfredo Rodriguez ou encore Roberto Fonseca. Avec eux, il revisite les codes du jazz et crée des musiques au genre nouveau, invitant à la contemplation, à la sérénité mais tellement bouillonnantes de vie.
Ce que l’on voit est magnifique. Entre les couleurs et les lumières qui se dégagent de la scène, on assiste à un véritable ballet de mains, jouant à cache-cache avec les ombres, sur les pianos et les trompettes. L’harmonie entre les hommes et leurs instruments est palpable. Chacun semble à sa place dans cet orchestre et la magie qui s’en dégage nous donne des ailes, le pouvoir de planer, la puissance de la hauteur.
Nous voilà maintenant en Orient. Chez Odette pour des anecdodettes en tout genre. Odette, c’est la grand-mère du musicien, avec laquelle il a des tonnes d’anecdotes à raconter. En musique, il se remémore des souvenirs, qu’il nous partage le plus joliment : fier des nouveaux mots appris avec sa mamie, il rigole de la caricotte (dont le sens nous amène à comprendre qu’il s’agit plutôt de « carrycoat »).
Entre musiques traditionnelles orientales, rythmes cubains et jazz, Ibrahim Maalouf compose des morceaux riches d’essences et de racines, de cultures cosmopolites et y ajoute une touche, dont il est le seul à avoir le secret. Un subtil melting pot de musiques du monde, qu’il faut vivre en concert pour en saisir toute la grandiosité. Inventif et sans frontières, revisitant aussi les classiques, comme son solo au piano de La Lettre à Elise de Beethoven, Ibrahim Maalouf sublime chaque son pour le plus grand bien de nos sens.
S3NS, intemporel et ensoleillé, hors normes. Tout en élégance.
Anne-Laure, totalement jazzy boostée