(photo : TREVOR NAUD)
A l’heure où les grosses productions tabassent pour remplir des stades entiers, Songazine persiste et signe dans sa recherche d’excellence et de groupes qui sortent de l’ordinaire. La musique « fast food » facile à digérer, vite oubliée, autotunée et populiste ? Très peu pour nous !
Tout le monde peut boire du soda pétillant trop sucré et manger de vils sandwiches mais le bonheur pour nous est de choisir un vin qui se mérite et des plats aux goûts différents, rares et complexes.
Si le groupe Protomartyr était un restaurant (à Détroit, leur ville d’origine), ce serait un endroit un peu sombre mais chaleureux, planqué en dehors des grandes avenues, pas inscrit dans les guides mais connu des vrais amateurs, proposant un menu court mais épicé, servant avec rapidité des cocktails qui réveillent, et des desserts doux-amers. L’addition n’en serait pas trop salée, qui plus est. Voyez : l’ouïe et le goût se cultivent de la même manière…
On les a rencontrés à Paris (voir photo) a dégusté leur nouvel album « Formal Growth In The Desert ». Un bloc de fils électriques à nu, chargés à haute intensité à ingérer en plusieurs fois : sombre, brillant, dur et persistant.
Forts d’une longue carrière (déjà leur 6 ème album), les garçons restent modestes et souriants, sympathiques et impliqués. Ils m’expliquent que leur tournée printanière est « 100% promotionnelle » (c’est courageux).
L’été les verra jouer aux USA, puis en Europe et on les reverra en live à l’automne à Paris (9 novembre La Station- Gare des Mines).
Leur musique est qualifiée de tendue, violente, froide, agressive, raide ce qui est assez vrai et ceci semble être l’opposé de leur personnalité et commerce avec autrui (nous avons passé un moment relax et souriant dans les locaux de leur label, DOMINO, à Paris !).
NB : Domino est un très chouette label qui nous offre des groupes, musiques, artistes pointus et magnifiques dans une très large catégorie rock, pop, indie, post-punk… que des saveurs fines que les gourmets collectionnent avec passion. Pas du tout de hamburger qui coule, ni de prêt à manger plein de gras !
(NB : le rédac chef adore parler anglais !)
Lors de l’interview, j’évoque avec eux le soin qu’ils apportent à leur « identité graphique », très reconnaissable, ainsi que certains de leurs clips-vidéo qui génèrent une impression bizarre et persistante (exemple Make Way qui pourrait être une suite de Worm In Heaven, 2 ambiances dystopiques médico-anxiogènes) et il est clair qu’ils travaillent cela avec intelligence.
L’écoute répétée de Formal Growth In The Desert s’avère prenante. On vous l’a dit, c’est à mâcher plusieurs fois et ensuite on apprécie encore plus ses textures et subtilités qui piquent…
En clair, Protomartyr réunira des fans exigeants et adeptes de Père Ubu, voire Bauhaus, Joy Division avant Joy Division, Wire, etc.
A suivre, à partager entre amis et réservez votre table chez eux. Même si ce n’est pas complet, vous mettrez une note de 5 * ensuite !
Jérôme « Guide Michelin » V.
PS : anecdote !
Mon fils Matthieu V., avait chroniqué de belle façon leur album de 2015 dans les colonnes de notre très admiré confrère TSUGI !
Voir ci-après
Protomartyr — The Agent Intellect
Comment se porte le revival post– punk en 2015 ?
Il va bien, merci. La preuve avec ce troisième album de Protomartyr. Sur ce cru 2015, le groupe natif de Detroit ne renouvelle certes pas son style, mais le raffine et en perfectionne tous les aspects : rythmiques urgentes, son garage, timbre de voix mi-fantomatique, mi-colérique à la Mark Burgess (The Chameleons).
The Agent Intellect démarre pied au plancher avec un “The Devil In His Youth” furieux et mélancolique à la fois. Des morceaux tels que “Cowards Starve”, “Boyce Or Boice” et “Dope Cloud” font la part belle à la guitare de Greg Ahee et ses riffs acides. Riche et diversifié, l’album sait surprendre en plusieurs occasions, en proposant des morceaux plus contemplatifs. Avec par exemple le superbe “Pontiac 87”, dont la mélodie aussi cristalline qu’hypnotique évoque un Joy Division plus lumineux. “The Hermit” fusionne avec ingéniosité des influences psychédéliques et un esprit punk sans concessions.
S’il se montre moins rugueux que son prédécesseur, The Agent Intellect conserve quelques passages bruitistes et râpeux, comme ce “Why Does It Shake ?” et ses accès de saturation bourdonnante. Avis aux amateurs de post-punk moderne, Interpol n’est pas le seul groupe à avoir du talent !