Jeudi 10 janvier 2019, le directeur de La Clef Saint Germain en Laye (http://www.laclef.asso.fr/), Vincent Rulot, lance le début de cette conférence en soulignant le « paradoxe que ce soit un garçon qui présente cette soirée ». Lorsqu’il a proposé cette idée de conférence-échange-débat en partenariat avec LE RIF et HF Ile de France (http://hf-idf.org/), il a sollicité trois femmes, Elodie Clément, Rachel Khan et Karoline Rose afin qu’elles livrent leurs vécus et leurs expériences marquantes par rapport à cette thématique dans la culture et plus spécifiquement les musiques actuelles.
Mais avant cela le public mixte et de tous domaines a pu regarder une projection des plus parlantes en matière de mise en bouche témoin, la vidéo de Paloma Nîmes, salle de concert musiques actuelles (https://paloma-nimes.fr/). En 2015, Paloma Nîmes a signé un documentaire vidéo intitulé Où sont les femmes ? réalisé par Samy Mouméni qui est particulièrement significatif. Des témoignages d’artistes, techniciens et du public défilent et toutes ces anecdotes, commentaires ou vécus racontés questionnent et sensibilisent à la place et la part des femmes dans les musiques actuelles. La vidéo que l’on recommande fortement est disponible sur Youtube:
Le documentaire présente un milieu plutôt masculin, où il y a très peu de bassistes, guitaristes femmes ou batteuses. De plus on constate une grande difficulté à nommer une guitariste par des jeunes gens qui ironisent sur « y a la batterie de casseroles pour les femmes et la batterie musicale pour les hommes ». On se retient effectivement de (sou)rire. Mais la retenue n’est pas l’apanage de l’érotisation ou la réification de la femme dans les vidéoclips ou sur scène par exemple (le rap serait le style musical toutes catégories confondues le plus sexistes apparemment on laisse juger nous on en voit dans le documentaire une certaine idée !). La femme ferait-elle vendre plus que des casseroles?! A la différence, certaines femmes issues du mouvement punk des années 70 et 80 ont pu s’imposer sans trop se dénuder, se taire ou se mettre de côté à l’image aujourd’hui de DJettes de plus en plus nombreuses à faire sauter les ondes à la poêle des fosses scéniques. Le chiffre de 7% de techniciennes a retenu l’attention au niveau de l’ingénierie sonore ou lumineuse aux voix de témoignages d’ados conscients des clichés en ce domaine, « elles vont s’abîmer les ongles » ou le vernis si bien posé à la surface de carrières artistiques musicales à gratter.
Première conférencière, Elodie Clément, jeune trentenaire batteuse émérite, membre de plusieurs groupes dont Arborn(https://fr-fr.facebook.com/pages/category/Musician-Band/Arborn-510126752496142/) et professeure de batterie nous parle de son expérience dès l’enfance avec la parité femme/homme ou vice versa. Elle témoigne de la réalité artistique et musicale professionnelle notamment sur les coulisses non-apparentes. Elle a listé des souvenirs exemples et nous confie que son « cerveau a tendance à zapper et heureusement» quelques uns. Venant d’une famille de batteurs cela aurait été contre-nature qu’elle ne s’y adonne pas elle-même petite fille. « Mais une fille ça ne fait pas de la batterie (…) ce n’est pas possible ». Après un rejet direct et injuste lors d’une audition en sa qualité de jeune fille de 12 ans, elle s’est laissé aller à l’abandon de son instrument avant d’heureusement s’y remettre pour de bons et loyaux services envers ses élèves et le plaisir de nos oreilles. Cette année elle a environ 40 % d’élèves féminines en cours de batterie, un chiffre qui évolue petit à petit. Le talent d’Elodie Clément et sa passion pour la musique ont payé malgré son cumul de jeunesse et de féminité face aux freins, difficultés, lourde drague, blagues misogynes, harcèlement ou moqueries etc. qui constituent aujourd’hui autant de force sur son historique de femme dans la musique. Elle souligne en guise de conclusion la presque obligation de prouver par rapport aux hommes sa valeur qu’elle savait déjà être égale, et de s’autoriser à se sentir légitime et libre de pouvoir faire de la musique et ce à n’importe quel âge d’ailleurs !
Au tour de Rachel Khan (https://www.facebook.com/Lartkhan/) auteure, comédienne, scénariste et juriste de formation de confier ses ressentis par rapport à cette égalité si décriée. Tout d’abord elle se dit se sentir un peu en marge des autres intervenantes ne faisant pas partie du monde des musiques actuelles, et apportant des problématiques autres, mais elle fait belle et bien partie du macrocosme de la culture. Alors on a juste eu envie de lui dire chère Rachel Khan « oui vous êtes à votre place !». Elle nous raconte son expérience en visiteuse intervenante de prison à Poissy auprès de détenus, souvent fichés S. Là il est vrai on s’éloigne un peu mais pour mieux revenir à la thématique de la femme son égalité. Et en prison comme ailleurs une femme telle que Rachel Khan ne peut laisser indifférent. Selon Rachel Khan être femme c’est « accéder à ce qu’on est soi-même ». Elle combine le fait d’être femme et personne dite de couleur. Et ce racisme latent qui gangrène même un tant soit peu un milieu où l’ouverture et la (l’in)différence devraient garantir la bonne santé en apparence des métiers de la culture, elle l’a vécu. Ces mots que sont la diversité et l’acceptation de soi et des autres sont lâchés et on est au cœur du noyau en fusion, des remous de ce qui peut secouer une société qui peut se montrer si cloisonnée à bien des égards. Mais pour elle à travers l’art on peut décloisonner tout cela, et notamment par rapport à la question de l’esthétique si importante et par rapport à cela Rachel Khan précise qu’elle a contribué à l’ouvrage collectif Noire n’est pas mon métier (Editions du Seuil, 2018) que l’on recommande en lecture. En tant que femme artiste et comédienne elle rappelle alors l’existence de la charte des 50/50, soit celle garantissant des cachets égaux entre femmes et hommes à la perception. A la réalisation, il demeure bien des problèmes ou des oublis ou…..on se sait plus trop quoi ! Mais on se rappelle à quel point Aimé Césaire était un grand auteur et poète lorsque Rachel Khan le cite en concluant son apport artistique à la conférence « Les artistes sont les législateurs de l’ombre », et de la lumière on s’apprête à en avoir plein phares sur la scène de l’Eclipse de La Clef avec l’intervention de la troisième et dernière conférencière Karoline Rose. (https://www.facebook.com/SUN.THE.METAL.BAND/ ).
Elle est la chanteuse et guitariste du groupe Sun the Metal Band de brutal death metal comme elle utilise autant sa voix chantée que sa voix criée. Née en Allemagne, elle est arrivée en France à l’âge de 15 ans. Comme Elodie Clément elle a fait face à des expériences et des réflexions ridicules mettant en cause sa féminité et sa liberté d’artiste également. « Pourquoi t’es en colère comme ça ? ». En Allemagne, dit-elle, il est très glamour de faire du punk et ainsi pour elle c’est une chance d’avoir grandi dans ce pays frontalier qui peut être si loin en mentalité et pourtant si proche de la France. Compositrice et interprète elle a entendu les conseils de gens du monde de la musique mais ne les a pas écouter pour faire de l’électro pop. Elle confie avoir fait une dépression avant de faire la rencontre chanceuse et artistique de avec un homme aux côtés de qui il n’y avait pas de rapports de drague, ni de supériorité autre que la volonté de vivre de sa musique. Karoline Rose ajoute la notion d’entraide à l’issue de son témoignage, « il ne faut pas avoir peur de s’entraider ». A commencer par une entraide entre femmes déjà, sans sentiments tels que l’indifférence ou l’égotisme par exemple. On taira le nom de la chanteuse française qui par faute d’indifférence ou manque de temps lui a mis un « vent » alors qu’on la lui présentait et qu’elle a même repris une de ses chansons. Il n’est pas à l’ordre du jour de voler tel ou tel travail à telle ou telle chanteuse, c’est juste une question de relations humaines, le relationnel n’ayant pas de différence de genre notable afin de pouvoir bien s’appliquer, comme le vernis probablement ! On ne manquera pas d’aller la voir en scène et de suivre son actualité, elle était dernièrement aux Inouis Printemps de Bourges le 22 janvier 2019, là où bien des femmes artistes ou musiciennes accomplies se produisent.
L’avis de la gente masculine présente en nombre inférieur n’est pas en reste ce soir-là ce qui importe et compte. Une jeune femme du public intervient alors, elle trouve qu’on a évolué sur le sujet même si elle s’est éloigné elle-même du show business étant chanteuse professionnelle et professeure de chant également. Ensuite un homme officiant à La Clef manifeste son avis et ça se discute sans disputes, des choses ont changé oui, dans une certaine mesure comme cela fait déjà un bon moment qu’à l’école (ceci est à souligner) les enseignants oeuvrent ainsi que dans d’autres secteurs à prôner la parité en matière de carrières futures y compris dans musiques actuelles…mais il faut continuer, à sensibiliser, à éveiller, à attirer les inconscients sur ce genre de sujet d’actualité engendrant émotions et intérêt.
On le sait les pratiques musicales sont genrées. Marie, qui travaille au RIF (Réseau des Musiques Actuelles http://www.lerif.org/) nous a présenté quelques données statistiques à ce sujet sur la place des femmes parmi les intermittent.e.s du spectacle même si celles-ci datent de quelques années ! Il apparaît sans surprise et presque de manière résignée que les femmes sont en nette infériorité. Mais c’est sans compter sur Chloé Mons, une autre intervenante non conférencière, qui travaille à FGO Barbara (http://www.fgo-barbara.fr/) sur ce sujet au niveau de Fleury Goutte d’Or, qui nous expose des initiatives très appréciées en matière d’égalité F/H en précisant que la programmatrice est une femme et que sa direction apporte grand soin et soutien à mettre en valeur l’écriture inclusive par exemple ou bien une rubrique quotidienne écrite et intitulée ‘‘Les mots de…..’’ donnant la parole à des femmes dans le milieu de la musique comme une cheffe d’orchestre par exemple. Des démarches exploratoires sont en cours et toutes les initiatives sont bonnes à découvrir et développer. Car on a envie d’agir, de voir une nouvelle génération émerger sans problèmes, limitations, discriminations ou différences dues à ce qui constitue juste des caractères physiques complémentaires…..des enfants, des filles, pour qu’elles n’aient plus a subir ce que tant ont connu, car tout le monde n’est pas pourvu de la même force et que la sensibilité des jeunes gens peut amener a faire une croix sur des rêves, des capacités alors que l’on devrait croiser le faire avec l’être pour en tirer du bonheur musical. Aller aller y a encore du chemin à parcourir, une des voies possibles mettant sur le chemin du mot clé de l’éducation….peut-être. La musique par et pour tous, c’est déjà demain !
Vanessa Mori-D